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|
Petit
motif n’occupant qu’une partie de la justification (voir
ce mot).
Composition
au plomb : lingot destiné à créer un blanc important dans une
ligne, par exemple pour justifier une ligne creuse.
1.
Cadrat dont l’épaisseur est égale à la force du corps utilisé. En
termes moins typographiques : la face supérieure du lingot
est carrée.
Corps
(en points) |
Retrait
(en cm) |
8
|
0,28
|
9
|
0,32
|
10
|
0,35
|
11
|
0,39
|
12
|
0,42
|
13
|
0,46
|
14
|
0,50
|
Vendémiaire,
brumaire, frimaire, nivôse, pluviôse, ventôse, germinal, floréal,
prairial, messidor, thermidor, fructidor.
Le
calibre des armes (diamètre de l’âme du canon) s’exprime en
chiffres arabes. Du pistolet d’alarme à la pièce d’artillerie
lourde, l’unité de mesure est le millimètre. Lorsque la nature de
l’arme est précisée, l’unité de mesure sera omise avec
profit : un canon de 75.
Pour
Impr.
nat. 1990, lorsque le calibre est substantivé et
désigne l’arme elle-même, le symbole d’unité de mesure est
sous-entendu. C’est vrai lorsque le calibre suffit à caractériser
clairement une arme : un 7,65 ; « Les deux canons,
des 75, étaient en batterie des deux côtés d’une large avenue
qu’ils balayaient. » – André MALRAUX,
l’Espoir. En revanche, on devra se montrer plus précis dans
d’autres cas : un 9 mm.
Plusieurs
calibres « anglo-saxons » sont d’un usage courant.
•
Usage traditionnel aujourd’hui déconseillé dans les textes
destinés à être lus par un public plus large que celui des écoles
d’artillerie : emploi du centimètre pour le calibre des
pièces d’artillerie allemandes.
Jadis, le calibre d’une pièce d’artillerie correspondait au poids
du boulet qu’elle tirait, et l’unité de mesure était la livre.
Composition au plomb : outil servant à vérifier la force de
corps des caractères.
« On se
sert souvent des lettres capitales pour mettre
à la tête de certains mots que l’on veut distinguer
des autres et faire remarquer dans l’écriture, soit imprimée,
soit manuscrite ; mais on est fort peu d’accord sur la
manière
de se servir de ces lettres, et l’on trouve à cet égard bien
des contrariétés entre les auteurs. »
Pierre Claude Victoire BOISTE,
Dictionnaire universel de la langue françoise.
Points
abréviatifs dans gr. cap., qui se lit « grande(s)
capitale(s) ». En revanche, il est inutile d’affubler
l’abrègement « cap » d’un point abréviatif, puisqu’il
s’agit d’une troncation. On prononce « cap ».
Ornement
servant de cadre.
« Mais
il s’est produit une très grande diversité
dans la distribution des cassetins, et chaque
imprimerie l’a réglée suivant la nature de ses travaux
habituels. Nous n’avons trouvé, dans les casses en
usage, aucune combinaison qui nous parût propre
à être offerte comme un type normal. Nous avons
donc pris le parti de créer un modèle, que nous
avons établi suivant les données les plus générales
et les plus rationnelles. »
Henri FOURNIER,
Traité de la typographie.
Boîte plate et compartimentée où sont répartis tous les signes et
les blancs fractionnaires d’une police (caractères du même corps)
nécessaires au compositeur. (Plusieurs casses ne contiennent pas
l’intégralité d’une police de labeur. Les sortes surabondantes
sont rangées dans des bardeaux, immenses tiroirs à cassetins,
voire dans des cornets en papier.)
Beaucoup d’ouvrages reproduisent le schéma de la casse
« parisienne ». S’il est vrai que cette casse fut la
plus utilisée, ce serait une erreur de croire que les tentatives
de normalisation imposèrent jamais un modèle unique : il y
eut les casses Rignoux, Breton, Raçon, Billoux, Jouglet, la casse
dite « de la Commission », la casse lyonnaise,
etc. : Audin
1949 a relaté avec précision leur histoire. Cette
diversité ne facilitait pas la tâche des apprentis et des
compositeurs à l’humeur vagabonde. Au XIXe
siècle, la plupart des bons auteurs de traités et de manuels
typographiques (Fournier
1903, Lefevre
1883) ont proposé leur propre modèle de casse.
D’autres
casses, très différentes, étaient conçues pour la composition de
l’anglaise, de la ronde, de la musique, des langues étrangères,
etc. ; d’autres étaient destinées aux signes mathématiques,
aux vignettes, aux accolades, aux filets, etc.
On
rangeait les casses dans des meubles appelés layettes.
Dans
l’argot des typographes, « être à fond de casse »
signifiait : avoir la gueule de bois.
Plusieurs auteurs modernes écrivent que la grandeur des cassetins
est proportionnelle à la fréquence d’emploi des lettres qu’ils
contiennent. Très approximativement. Les écarts de fréquence sont
tels qu’un brin de souplesse s’impose dans le calcul des
dimensions : les « e » d’une police de labeur sont
quatre-vingt-dix fois plus nombreux que les « w » et
neuf fois plus nombreux que les « g » ; le cassetin
des « e » est six fois plus grand que celui des
« w », trois fois plus grand que celui des
« g ».
Aujourd’hui,
un anglicisme se répand, qui attribue à « casse » une
acception nouvelle. Sous l’influence de change case, les
francophones admettent que « changer de casse »
signifie : passer du haut au bas de casse, et vice versa.
Cette extension de sens et cet emploi sont parfaitement légitimes.
En revanche, l’adoption de « sensible à la casse »
(d’après case sensitive) est pour le moins discutable…
À
Typographie, le 23 mars 1998.
B.
LOMBART :
Les minuscules sont le « bas de casse », et les
majuscules le « haut de casse ». Mais quel est le
terme générique pour dire : majuscule ou minuscule ?
Dit-on : « Ce moteur de recherche prend en compte la
casse » ? Ou « la hauteur de casse » ?
Comment faut-il dire ?
T.
BOUCHE :
[« Casse » serait] une traduction de l’anglais
case, c’est ça ? Certains répondront « oui »
(certains parmi ceux-là diront : « D’ailleurs je le
fais tous les jours »), mais je ne trouve pas ça
satisfaisant.
« Changer
de casse » est de nos jours assez répandu. C’est sans doute
regrettable, mais qu’y faire ? Trouver mieux et l’imposer (je
veux dire : l’introduire dans l’usage) ? C’est possible,
souhaitable, mais c’est loin d’être fait… Qui se soucie
aujourd’hui du fait que des minuscules accentuées comme à,
è, ù, ê se situaient dans le haut de la casse
[…] ? Il y a belle lurette (en gros, depuis qu’il n’y a plus
de casses) que ces signes appartiennent au bas de casse, qui
regroupe, sans équivoque, toutes les minuscules.
T.
BOUCHE :
Au fait, quand Bringhurst parle de tricameral, je
suppose qu’il renvoie à une étymologie latine. Y aurait-il un
salut de ce côté-là ?
Là
où je te suis, avec Bringhurst, c’est sur l’indispensable
tricassité (minuscules/médiuscules/majuscules > bas de
casse/petites caps/grandes caps) !
À
Typographie, le 2 février 2001.
P.
ANDRIES :
J’aimerais avoir un petit mot pour désigner la casse des mots
comme vederLa (en italien) ou McCormack (en
anglais). Ils ne sont ni écrits en majuscules, ni en minuscules
mais en…
Je
ne comprends pas bien ta question.
D’abord
(contrairement à b. de c., caps et petites caps), majuscules et
minuscules ne sont pas des casses.
Question
casse, quelle différence avec Mac-Mahon ou Mac Orlan ?
Comme vederLa (c’est quoi ?) et McCormack,
ces noms sont ici composés en b. de c. Il se trouve que leur
catégorie leur fait prendre une majuscule, donc une cap initiale
(ou non, pour le mystérieux vederLa), et que leur
structure en impose une autre, interne.
La
différence entre McCormack et Mac Orlan n’est pas
affaire de casse mais de graphie. Le C de McCormack
est incontestablement une majuscule (donc une cap) au même titre
que le O de Mac Orlan. La soudure ou l’absence de
soudure, le trait d’union ou l’absence de trait d’union ne
changent rien à la « casse ». Sauf… sauf pour ceux qui
soudent à tire-larigot et qui se trouvent bien démunis quand la
saison du tout en caps est venue. Ainsi, McCormack ne
peut-il devenir MCCORMACK et se compose-t-il plus
clairement McCORMACK. Donc… le vrai problème de
« casse » n’est pas celui que pose le C de Cormack…
mais le c de Mc…
Cathédrale
Église
Supprimer
un ou plusieurs éléments d’un ouvrage ou d’une publication. Cette
« censure » s’effectue pour des motifs divers,
volontairement ou par contrainte.
« Passer
au caviar » évoque une pratique courante dans la Russie de
Nicolas Ier : les censeurs appliquaient une couche
d’encre noire et épaisse sur un fragment (ou la totalité) d’un
texte, afin d’en interdire la lecture. Aujourd’hui, on caviarde
plus discrètement.
Chacun
ses goûts : à l’oral (théâtre, télévision, etc.), on ne
caviarde pas, on sucre.
Voici ce que proposait l’abbé de Petity (Petity
1766), prédicateur de la reine : « On
pourroit encore tirer un autre service de la cédille en
faveur des Enfans & des Étrangers, qui sont souvent embarassés
sur la manière dont ils doivent prononcer le t dans
certains mots ; ce seroit, d’appliquer ce signe à cette
lettre, quand elle a la valeur du s ; comme dans les mots minutie,
portion, faction, quotien, etc. par cet
expédient, sa prononciation seroit réglée ; & l’on ne
confondroit plus les cas, où elle a sa valeur naturelle ;
comme dans les mots, partie, question, digestion,
chrétien. Quand il en coûte si peu, pour rémédier à des
imperfections ; c’est vouloir gratuitement les éterniser, que
de les laisser subsister. ».
Un
siècle plus tard, Didot
1868 soutiendra la même thèse.
Cent Mille, mil, millier.
Accord
Cent
ne prend pas la marque du pluriel.
1.
Au singulier… : cent dix.
2.
Lorsqu’il est ordinal : page deux cent (la deux centième
page) mais deux cents pages ; en mille neuf cent (la mille
neuf centième année de l’ère chrétienne) mais mille neuf cents
francs.
3.
Lorsqu’il est suivi d’un autre numéral : deux cent
vingt-trois ; deux cent mille.
Attention
à millier, million et milliard, qui ne sont pas des adjectifs
numéraux mais des noms ; placé avant eux, cent prend la
marque du pluriel : deux cents milliers de têtes de bétail,
trois cents millions d’énergumènes, quatre cents milliards de
spermatozoïdes. Mais : trois cent quarante millions de
roupies, quatre cent cinquante milliards d’étoiles. (Deux cent
trente-trois milliers serait ridicule et fautif, car milliers
exclut toute précision.)
Expressions diverses
Des
mille et des cents, les Cent-Jours,
le Conseil des Cinq-Cents.
En
français, césure désigne une coupure rythmique au sein d’un vers
ou d’une phrase (éventuellement musicale). Et pas autre chose… Les
éditeurs et les traducteurs de logiciels, quelques auteurs de
manuels, des journalistes spécialisés n’en ont cure ou
l’ignorent : ils désignent ainsi ce que les typographes et
les grammairiens ont toujours appelé la division ou la coupure de
mots en fin de ligne.
Académie
1994, Grevisse
1986, Frey
1857, Paput
1997, Richaudeau
1989.
Gradus
1980, Perrousseaux
1995, Typogr.
romand 1993.
La
Chambre, la Chambre des communes (les Communes), la Chambre des
députés, la Chambre des lords, la Chambre des pairs, la Chambre
des représentants, la Chambre des requêtes.
Une
chambre ardente, la chambre de commerce de Bordeaux (Lyon,
Toulouse, etc.).
Championnat
Manifestation
sportive
Chapelle
Monument
Abréviation :
chap. (chapitre, chapitres).
••
Le mot chapitre ne s’abrège que dans les notes, les
annexes, etc. Dans le texte courant, il ne s’abrège que dans les
références situées entre parenthèses.
Lefevre
1883.
¶ Numérotation
••
Dans le corps du texte, et selon la nature de celui-ci, les
numéros de chapitres se composent soit en toutes lettres, soit en
chiffres romains petites capitales : le troisième chapitre
est assommant ; commentez la fin du chapitre IV.
•••
Dans les références, ils se composent toujours en chiffres romains
petites capitales : Id. chap. IV.
••
Dans les titres, ils se composent en chiffres romains grandes
capitales, à l’exception du premier (si le mot chapitre
figure dans le titre), composition centrée :
II | III |
CHAPITRE II | CHAPITRE III |
¶ Typographie soignée
¶ Définitions
1.
Acception première : la chasse est un excédent de
composition non prévu : n’ayant pas trouvé de place
disponible, des caractères ont été chassés de la ligne, des
lignes ont été chassées de la composition. Les causes sont
multiples : remaniements, ajouts, corrections, erreur
d’appréciation du typographe, copie mal calibrée, emploi d’une
police qui chasse beaucoup.
Pour
corriger une chasse inopportune ou excessive, il faut gagner.
Druet
& Grégoire 1976, Larousse
1933, Littré
1872, Robert
1985.
2.
Par extension, épaisseur d’un caractère
« typographique » (plomb). Les approches naturelles
sont par nature incluses dans la chasse.
Académie
1994 s’y perd un peu et inverse les termes de
l’extension de sens.
3.
Aujourd’hui : largeur d’un signe typographique. Pour
certains auteurs, les approches ne sont pas incluses dans la
chasse, pour d’autres, elles participent à la chasse :
cette divergence n’a aucune incidence pratique. Quelle que soit
la définition retenue, il est évident qu’au sein d’une même
police les divers signes chassent plus ou moins :
image ! ! !. La chasse varie également avec la
force du corps : image ! ! !.
Dans
une même famille, des fontes chassent plus que d’autres :
¶ Chasse
interdite ?
Les
logiciels permettent de jouer facilement avec la chasse. Pour la
plupart des scripteurs, la manœuvre est inutile et
risquée ; ses effets sont souvent désastreux. Tout abus est
sanctionné par l’amoindrissement — voire par l’anéantissement —
de la lisibilité des textes ainsi martyrisés.
Châtain Couleur.
« Elle
s’appelait Virginie et elle était châtaine. »
Charles CROS,
le Collier de griffes.
Châtain
s’accorde en nombre : des cheveux châtains. Pour le
genre, les avis sont partagés. Le féminin fut longtemps
considéré comme irrégulier et inutile : châtain est
dérivé de châtaigne, nom commun employé comme adjectif
féminin. Cet argument n’a plus aucune justification :
adjectif de couleur, châtaigne est devenu très rare et,
contrairement à châtain, ne qualifie plus une chevelure (••
archaïsme délibéré chez quelques écrivains). Il demeure
toutefois que le féminin châtaine(s) n’a rien de
particulièrement séduisant : {une chevelure châtaine, des
femmes châtaines}. Affaire de goût… On peut préférer :
une chevelure châtain, des femmes châtains (ou châtain, si
l’on appartient au dernier carré des tenants de
l’invariabilité en genre et en nombre).
(Invariable en genre) Larousse
1999.
(Féminin facultatif ou déconseillé) Colin
1994, Français
contemp. 1992, Lexis
1989, Robert
1993.
(Féminin conseillé ou obligatoire) Académie
1994, Girodet
1988, Hanse
1987, Larousse
1933, Thomas
1971.
Château
Monument
Cheminée
Lézarde
Chiffres Cent, Mille, mil, millier, Nombre, Zéro.
Les
chiffres français se fondent harmonieusement dans le gris du
texte : .
Ce
n’est pas le cas des chiffres anglais :
Il
existe des partisans du « tout en chiffres ». Leur
argumentation mérite qu’on s’y attarde. L’astuce consiste à
faire accroire que « les autres » sont d’incurables
crétins partisans du « tout en lettres ». Voici un
passage intitulé « Chiffres ou lettres », extrait de
Richaudeau
1989 :
« “Deux
mille un, l’odyssée de l’espace”
« “2001
l’odyssée de l’espace”
« Comme
les responsables du célèbre film ont eu raison de composer le
millésime en chiffres arabes et non en signes alphabétiques.
Mais pourquoi cet exemple n’est-il pas généralisé, pourquoi
les nombres sont-ils presque toujours imprimés en lettres et
non en chiffres ? »
À
l’exception des notaires et des poètes, tout le monde écrit et
compose les années (dates) en chiffres arabes (voir : An,
année). L’exemple, déjà
« généralisé », est mal choisi, d’autant que 2001
n’est pas un millésime (voir : Millésime).
D’autant que le titre français du film de Stanley Kubrick est
2001, l’Odyssée de l’espace. Poursuivons notre
lecture :
« Quelle
curieuse évolution historique dans la composition de :
« 1. | M D C C L X X X I X | 10 | signes |
« 2. | 1 7 8 9 | 4 | signes |
« 3. | mille sept cent quatre-vingt-neuf | 28 | signes [sic] |
Dessin
et histoire du dessin des chiffres
À
Typographie, le 13 octobre 1997.
J.
ANDRÉ :
On parle de la queue du 9. Comment appelle-t-on le
contraire pour le 6, c’est-à-dire ce qui correspond
en gros à la hampe du f ?
Bien
qu’il soit admis (aujourd’hui… c’est récent) avec cette
acception dans les dictionnaires de la langue et dans de
nombreux ouvrages consacrés à la typographie, je ne suis pas
très séduit par l’emploi de « queue » dans
l’architecture de la lettre. C’était et c’est un terme relatif
à la composition (fin de page laissée en blanc).
Il
me semble que le 9 (longue du bas dans les chiffres
elzéviriens) a une hampe (certes courbe, mais pas plus que
celle de certains g italiques) descendante ; le 6 (longue
du haut), une hampe ascendante.
Même
si c’est un peu discutable (en principe, les hampes
descendantes descendent sous la ligne de base…), cela peut
s’appliquer aussi aux chiffres dits anglais. Par analogie…
On
a d’ailleurs le même problème si, par exemple comme le Robert,
on retient « queue » pour désigner strictement la
portion de la hampe qui descend sous la ligne de base… Comment
parler de « queue » à propos du 9 anglais ?…
Par parenthèse, cette difficulté terminologique montre à quel
point les chiffres « calibrés » sont autant de
cheveux sur la soupe des lettres…
Certains
auteurs adoptent « queue » pour désigner une
terminaison quelconque de trait, voire un trait accessoire. On
peut dès lors parler de queues ascendantes, descendantes,
horizontales, obliques, etc. En dépit de ma remarque initiale
(que je suis prêt à qualifier de dérisoire et qui sent un peu
la naphtaline) sur la double acception, cette extension de
sens me semble intéressante.
Si
on la retient, rien n’interdit de parler de la queue du 6, ce
qui rejoindra une symbolique presque aussi vieille que ce
chiffre (il faudra éventuellement songer à débaptiser sa
« panse »).
À
Typographie, le 11 mars 1998.
J.
ANDRÉ :
Pourquoi nous, Français, mettons une barre au 1 qui
ne se confond plus avec le 7 (barré en français) et
pourquoi les Anglais dessinent-ils le 1 comme un i
ou un l, et le 7 comme un 1 ?
Là,
c’est plus vraiment de la typo, mais de la calli…
Les
linéales dont les 1 reprennent la graphie manuscrite
minimaliste des Anglo-Saxons sont (scusez…) extrêmement rares.
Encore heureux : outre le I (i cap) et le l (L b. de c.),
elles se retrouvent avec un troisième signe quasi identique
(1, un).
Y
a le Gill, évidemment… très beau, mais mieux vaut ne pas avoir
à composer un machin abrégé relatif à la première
illustration : …
Pareil
pour les 7 barrés… Je n’ai pas cherché à en débusquer, mais, a
priori, ils ne courent pas les polices, même les scriptes et
les manuaires. Sur le même sujet… les polices empattées ne
sont pas entièrement à l’abri du danger : le
elzévirien ressemble parfois furieusement au
petite cap…
À
Typographie, du 5 au 27 novembre 1998.
M.
BUJARDET :
En tradition anglo-saxonne, qui domine aujourd’hui largement
les polices de caractères industrielles, les chiffres
« à l’ancienne » sont ainsi présentés : 1,
2 et 0 ont la taille et la position des bas de
casse. 3, 4, 5, 7 et 9
ont la taille des capitales, mais le haut des lettres est
aligné sur les bas de casse. 6 et 8 ont la
taille et la position des capitales.
À
mon avis, c’est cela la tradition française… À moins que les
typographes français de la Renaissance ou du Grand Siècle
n’aient été anglo-saxons sans s’en douter… Elle remonte
d’ailleurs encore plus haut dans le temps, bien avant Gugutte…
M.
BUJARDET :
D’après Matthew, la tradition française serait différente,
notamment concernant le 3 et le 5.
Ce
qui est vrai, c’est qu’il y a des variantes (regrettables…).
La plus répandue (surtout dans les didones et les modernes XIXe-début
XXe)
est sans doute celle-ci :
:
hauteur d’x ;
:
hauteur et position des grandes caps ;
:
hauteur des caps, haut aligné sur celui des bas de casse.
Dans
des sous-variantes, elle devient parfois hideuse (par exemple
dans le Didot millimétrique) à cause du :
hauteur du corps, ou peu s’en faut…
T.
BOUCHE :
[…] Le 1 n’est pas autre chose qu’un I
petite cap…
En
romain, et encore pas toujours. Regarde une belle police
elzévirienne de très près : tu verras que (souvent)
l’empattement du chiffre b. de c. est plus long que
celui de la voyelle petite cap. Bon, ça joue à un poil de c…,
mais ça joue…
T.
BOUCHE :
En particulier, pourquoi le zéro n’hérite-t-il pas de l’axe
et des pleins &
déliés du caractère environnant ?
Pour
au moins deux bonnes raisons (a posteriori…). D’abord,
justement, pour qu’il ne soit pas confondu avec le
« o » (lettre) bas de casse… Ensuite, le
« 0 » (zéro) cap rom. a généralement un axe vertical
(même dans les humanes et les garaldes), son petit frère (même
si c’est l’aîné…) n’a aucune raison de faire le zouave…
D’autant que la question de l’axe ne se pose pas que pour le
zéro…
Par
ailleurs, regarde encore une fois de plus près… Dans de
nombreuses bonnes polices elzéviriennes d’hier et
d’aujourd’hui, le zéro b. de c. a des pleins et des
déliés, certes imperceptibles à l’œil nu dans les petits
corps, certes beaucoup moins marqués que dans la voyelle
b. de c., mais ils sont là ! Il est vrai que,
par exemple, quelques antiques merveilles de l’I.N. (Garamond,
Grandjean…) et quantité de clones approximatifs ont un zéro
b. de c. invraisemblable (cercle filiforme, pauvret,
lamentable…).
Comme
toi, je trouve cela très mystérieux… Existait-il dans les
poinçons d’origine ?
T.
BOUCHE :
Je me souviens en particulier d’un texte de Jérôme Peignot
qui m’avait beaucoup intrigué, car il laissait entendre que
les chiffres elzéviriens avaient été inventés par les
imprimeurs bien après que la gestion des types eut été mise
au point ; et que leur forme avait été déterminée pour
l’imprimerie, et non par analogie avec une graphie
manuscrite (premier exemple, dans ce cas, d’une création
synthétique et non analogique — mais le texte auquel je fais
référence m’avait assez peu convaincu, tant il mélangeait
les époques et les références de façon anachronique).
Mouais…
rendons à nos membres souplement articulés ce qui leur
revient : si par exemple le 3 et le 9 terminent leur
course sous la ligne de base, c’est parce que la main a été
entraînée dans ces parages… Il suffit de regarder certains
manuscrits XIIIe-XVe siècle)
pour le constater… ou, plus simplement, d’écrire en toute
décontraction nos dix chiffres (pour que l’expérience soit
probante, tracez deux lignes parallèles, distantes de 2,5 mm…
et écrivez rapidement entre ces rails : il y a gros à
parier que vous ne serez pas loin des elzéviriens).
Pour
en revenir au ridicule zéro élzévirien que l’on rencontre dès
l’origine, même chez les meilleurs… Un échange privé avec T.
Bouche (à propos du texte de Peignot) me fait penser à
ceci : ne serait-ce pas une volonté de rester plus ou
moins fidèle à l’aspect réellement riquiqui du zéro arabe, qui
n’est qu’un point, après tout, parfois un minuscule cercle
sans ambition, enfin un petit machin mesquin (même si son rôle
est énorme…), d’un poids dérisoire à côté de celui des neuf
autres membres de la bande ?
Quelqu’un
connaît-il une source où cette hypothèse serait sérieusement
étayée ? (Pas la filiation… mais la nette volonté de ne
pas accorder trop de poids graphique au zéro
elzévirien !)
Chiffres romains Chiffres.
Emploi
•••
En français, les chiffres romains ne peuvent être utilisés que
dans l’expression de nombres ordinaux (ou assimilables à des
ordinaux) : VIe arrondissement, XXe siècle,
Louis XIV (le quatorzième), tome V (cinquième tome),
MDCL (la mille six cent cinquantième année après la naissance
du Christ), etc.
Frey
1857.
Écrire
[XV de France], [rugby à XV], [jeu à XIII] est une faute
grave, car ce quinze et ce treize sont
définitivement cardinaux. > Quinze de France.
Grandes
capitales. Divisions principales : millénaires,
actes.
Petites
capitales. Divisions secondaires : siècles,
scènes.
Bas
de casse.Lorsque le dernier signe est l’unité, on
remplace i par j. i, ij, iij, vj, vij, viij.
En
italique, v était parfois remplacé par u :
xxuij (27).
Denis
1952, Frey
1857.
Remarque.
— Dans un tableau, dans une table des matières, les chiffres
romains s’alignent verticalement à gauche.
Impr.
nat. 1990.
1 | I | 31 | XXXI | 121 | CXXI | 1 300 | MCCC | |||||||
2 | II | 39 | XXXIX | 129 | CXXIX | 1 450 | MCDL | |||||||
3 | III | 40 | XL | 149 | CXLIX | 1 500 | MD | |||||||
4 | IV | 41 | XLI | 150 | CL | 1 515 | MDXV | |||||||
5 | V | 49 | XLIX | 151 | CLI | 1 600 | MDC | |||||||
6 | VI | 50 | L | 159 | CLIX | 1 650 | MDCL | |||||||
7 | VII | 51 | LI | 160 | CLX | 1 700 | MDCC | |||||||
8 | VIII | 59 | LIX | 199 | CXCIX | 1 789 | MDCCLXXXIX | |||||||
9 | IX | 60 | LX | 200 | CC | 1 800 | MDCCC | |||||||
10 | X | 61 | LXI | 220 | CCXX | 1 801 | MDCCCI | |||||||
11 | XI | 69 | LXIX | 300 | CCC | 1 848 | MDCCCXLVIII | |||||||
12 | XII | 70 | LXX | 400 | CD | 1 870 | MDCCCLXX | |||||||
13 | XIII | 71 | LXXI | 500 | D | 1 900 | MCM | |||||||
14 | XIV | 79 | LXXIX | 600 | DC | 1 901 | MCMI | |||||||
15 | XV | 80 | LXXX | 700 | DCC | 1 910 | MCMX | |||||||
16 | XVI | 81 | LXXXI | 800 | DCCC | 1 914 | MCMXIV | |||||||
17 | XVII | 89 | LXXXIX | 900 | CM | 1 939 | MCMXXXIX | |||||||
18 | XVIII | 90 | XC | 999 | CMXCIX | 1 968 | MCMLXVIII | |||||||
19 | XIX | 91 | XCI | 1 000 | M | 1 990 | MCMXC | |||||||
20 | XX | 99 | XCIX | 1 001 | MI | 2 000 | MM | |||||||
21 | XXI | 100 | C | 1 050 | ML | 2 001 | MMI | |||||||
29 | XXIX | 101 | CI | 1 100 | MC | 2 500 | MMD | |||||||
30 | XXX | 111 | CXI | 1 200 | MCC | 3 000 | MMM |
Chimie Abréviation.
•••
Les symboles chimiques prennent toujours la majuscule initiale
et se composent en romain : C, Ca, Cd.
•••
Ils ne sont jamais suivis du point abréviatif.
•••
Ils ne sont (hélas…) jamais accentués : Be pour
« béryllium », Ne pour « néon ».
•••
Ils ne s’emploient jamais hors des formules : la molécule
d’eau est composée d’un atome d’oxygène et de deux atomes
d’hydrogène.
« Qu’est-ce que vous buvez ? — H2O… —
C’est bon ? — Non. »
•••
Dans les formules, les symboles sont accolés sans espace.
Larousse
1985 : « La célèbre synthèse de l’urée
est une réaction d’isomérie avec le cyanate d’ammonium, tous
deux répondant à la formule CON2H4. »
•••
Contrairement à la plupart des « abréviations »
scientifiques, les symboles chimiques s’épellent : Cu ne
se lit ni cuivre ni cu mais céhu.
•
Classement alphabétique des formules (index, tableaux,
etc.) : chaque élément doit être considéré comme un mot.
Les symboles des éléments sont formés à partir de racines
latines (comme ferrum) ou grecques (comme astatos
ou iôdês), ou de bidouillages perpétrés sur des langues
diverses (allemand, arabe, etc.) dans le latin des alchimistes
(bisemutum, borax) et le gréco-latin
d’arrière-cuisine des chimistes (tantalum,
technétium). Cobalt, nickel, tungstène, wolfram, zinc
sont issus de langues germaniques. Comme les chimistes du Nord
ne sont guère favorisés par les racines grecques et latines,
on leur accorde volontiers cette compensation.
Remarquons
cependant qu’en français le wolfram (minerai de tungstène)
n’est pas du tungstène et que l’ancien usage du symbole Tu a
été inconsidérément abandonné.
Quelques
symboles ne coïncident pas avec le nom français des éléments.
Leur origine est précisée ici entre parenthèses :
l’antimoine (stibium) Sb, l’azote (nitrogène) N, l’étain
(stannum) Sn, le mercure (hydrargyrum) Hg, l’or (aurum) Au, le
potassium (kalium) K, le sodium (natrium) Na, le tungstène
(wolfram) W.
Code
typ. 1993 [berkelium] ; Doppagne
1991 {lutetium}.
•
Certains éléments ont changé de nom (et en conséquence de
symbole). Les formes vieillies ne doivent plus être employées.
Exemples :
[colombium (Cb)] > niobium (Nb) ; [glucinium (Gl)]
> béryllium (Be). Regrettons-le pour [tungstène (Tu)]…
Doppagne
1991.
Symboles des éléments
actinium | Ac | einsteinium 3 | Es | mendélévium 7 | Md | ruthénium | Ru | ||||||
aluminium | Al | erbium | Er | mercure | Hg | samarium | Sm | ||||||
américium | Am | étain | Sn | molybdène | Mo | scandium | Sc | ||||||
antimoine | Sb | europium | Eu | néodyme | Nd | sélénium | Se | ||||||
argent | Ag | fer | Fe | néon | Ne | silicium | Si | ||||||
argon | Ar | fermium | Fm | neptunium | Np | sodium | Na | ||||||
arsenic | As | fluor | F | nickel | Ni | soufre | S | ||||||
astate 1 | At | francium | Fr | niobium | Nb | strontium | Sr | ||||||
azote | N | gadolinium | Gd | nobélium | No | tantale | Ta | ||||||
baryum | Ba | gallium | Ga | or | Au | technétium | Tc | ||||||
berkélium | Bk | germanium | Ge | osmium | Os | tellure | Te | ||||||
béryllium | Be | hafnium | Hf | oxygène | O | terbium | Tb | ||||||
bismuth | Bi | hahnium 4 | Ha | palladium | Pd | thallium | Tl | ||||||
bore | B | hélium | He | phosphore | P | thorium | Th | ||||||
brome | Br | holmium | Ho | platine | Pt | thulium | Tm | ||||||
cadmium | Cd | hydrogène | H | plomb | Pb | titane | Ti | ||||||
calcium | Ca | indium | In | plutonium | Pu | tungstène | W | ||||||
californium | Cf | iode | I | polonium | Po | unnilhexium 9 | Unh | ||||||
carbone | C | iridium | Ir | potassium | K | uranium | U | ||||||
cérium | Ce | kourtchatovium 5 | Ku | praséodyme | Pr | vanadium | V | ||||||
césium 2 | Cs | krypton | Kr | prométhéum 8 | Pm | xénon | Xe | ||||||
chlore | Cl | lanthane | La | protactinium | Pa | ytterbium | Yb | ||||||
chrome | Cr | lawrencium 6 | Lr | radium | Ra | yttrium | Y | ||||||
cobalt | Co | lithium | Li | radon | Rn | zinc | Zn | ||||||
cuivre | Cu | lutécium | Lu | rhénium | Re | zirconium | Zr | ||||||
curium | Cm | magnésium | Mg | rhodium | Rh | ||||||||
dysprosium | Dy | manganèse | Mn | rubidium | Rb |
Cicéro Mesure typographique.
Larousse
1992 (entrée [cicero] ; « cicéro »
à l’article « Douze ») : « Épaisseur de
douze points typographiques, qui sert d’unité de longueur en
imprimerie. Syn. : douze. »
Robert
1985 : « Caractère d’imprimerie de
douze points typographiques, soit 4,5 mm (unité de mesure
typographique). »
Circonscription
universitaire
Académie
« Pas
trop de citations d’anglais, d’italien,
d’espagnol. Tu as l’air d’un larbin d’hôtel qui colle
des étiquettes sur des bagages. »
Léon-Paul FARGUE,
Suite familière *.
« L’aphorisme : c’est LA
citation par définition
pour le monde universitaire — mais de l’aphorisme
à la connerie, il n’y a que la minceur du temps. »
Yak RIVAIS,
les Demoiselles d’A.
Vocabulaire
Une
citation n’est pas nécessairement un extrait.
Exemples.
— Il citait souvent cette phrase de Picabia : « Si
vous voulez avoir des idées propres, changez-en comme de
chemise. »
« Les
répliques célèbres comme “Sans dot”, ou, sur le cœur à
droite : “Nous avons changé tout cela”, ou bien
l’ironique : “Des mots, des mots, des mots”, sont fort
difficiles à dire. » – ALAIN,
« le Comédien », Propos.
Citation
dans la citation
« Un
jour de l’an passé, sur le pont des Arts, quelqu’un de mes
confrères de l’Institut se plaignit devant moi de l’ennui de
vieillir. “C’est encore, lui répondit Sainte-Beuve, le seul
moyen qu’on ait trouvé de vivre longtemps.” J’ai usé de ce
moyen, et je sais ce qu’il vaut. » – Anatole FRANCE,
le Crime de Sylvestre Bonnard.
Références
Dans
les ouvrages sérieux, l’équité n’a pas sa place ;
l’anonymat est parfois nécessaire. On peut le regretter :
« Puisque
les légumineuses sont phosphatées, quelle raison avait
Franklin de plâtrer la luzerne ? [Marie P.,
quarante-cinq ans, institutrice. — Démence précoce. — Écrit
spontané.] » Citation empruntée au [Dr
J. R. de F.], ancien chef de clinique à la faculté de
médecine de [P]., « Écrit prémédité », les
Écrits et les Dessins dans les maladies nerveuses et
mentales.
Joseph
Rogues de Fursac avait un nom en 1905, mais Marie, auteur
d’une si belle phrase, n’aura jamais qu’une initiale derrière
son prénom.
Fausses
citations
Elles
méritent d’être traitées comme les vraies. Singulièrement les
« vraies-fausses », dont le modèle, insurpassable,
est dû à Tristan Corbière (épigraphe de
« Ça ? », les Amours jaunes) :
« “What ?
…”
SHAKESPEARE »
Les
citations « fabriquées » sont moins subtiles mais
parfois drôles. Deux exemples empruntés à Alexandre
Breffort : « Zut ! j’ai loupé ma
correspondance ! » (Madame de Sévigné.) « Tout
le monde descend ! » (Charles Darwin.)
Citation
mise en exergue,
voir : Épigraphe.
I.
Guillemets « continus »
et citations dans une citation
À
Typographie, le 6 mai 1997.
M.
ANDRÉANI :
Je trouve très commode dans les dialogues sur courrier
électronique le signe > qui apparaît en tête de ligne
lorsqu’on cite un interlocuteur […]. Existe-t-il un
équivalent typographiquement correct ? Quel est le bon
goût en ce domaine, si tout un paragraphe doit être
immédiatement vu dans une page comme une citation ?
T.
BOUCHE :
L’exact équivalent existe, quoique légèrement désuet :
mettre un guillemet ouvrant en début de ligne tant que la
citation dure. Une version plus soft est de reprendre ce
guillemet en début d’alinéa (mais pas à chaque ligne).
Pas
exactement. Les guillemets (ouvrants, mais pour certains
typographes fermants) au début de chaque ligne n’indiquent
(n’indiquaient ?) que les citations secondaires (citation
dans une citation). Pour les citations principales, on se
contente de guillemets ouvrants au début de chaque alinéa.
À
Typographie, le 28 avril 1998.
M.
BOVANI :
Je préfère quant à moi les guillemets ouvrants [dans ce cas
d’une citation dans une citation], peut-être juste par
habitude, et je ne vois pas de raison qui justifie une
solution plutôt que l’autre…
Aïe !
Ça n’a pas traîné, t’es sans pitié (je suis déjà en
retard !)…
Bon…
en deux mots : dans ce rôle, je préfère les guillemets
fermants car ils sont moins ambigus que leurs frères. Là où
ils sont, ils ne peuvent rien fermer (alors que les guillemets
« ouvrants » peuvent être perçus comme tels) ;
par conséquent, ils peuvent se consacrer entièrement à leur
petit rôle d’indication marginale ! (C’est ma préférence,
mais ce n’est pas mon argument : celui-ci est aussi vieux
que les guillemets continus…)
De
toute façon, fermants ou ouvrants, les pauvres guillemets de
citation seconde sont hélas tombés en désuétude… On comprend
pourquoi… La moindre modif (par exemple, une recherche
remplacement automatique…) peut foutre un bordel noir…
À
Typographie, le 29 octobre 1998.
J.
MELOT :
Il est vrai que des guillemets (français) à l’intérieur de
guillemets de même nature peuvent choquer, surtout s’ils
sont rapprochés. L’anglais a la solution du guillemet
(anglais) simple à l’intérieur des guillemets anglais
(pleins, ou, improprement, doubles). J’aimerais connaître la
position de Jean-Pierre Lacroux sur ce point.
Elle
est banale… mais pas très simple… Je résume un max…
1.
Les guillemets ne servent pas qu’à encadrer les citations…
mais c’est surtout des citations qu’on cause ici et
singulièrement des citations enchâssées.
2.
Pour les baliser, il existe deux (pour simplifier) méthodes.
L’une est traditionnelle et très belle (si on la
maîtrise…) ; l’autre est moderne et très pratique (ce qui
n’est pas rien). Hors contexte, il n’y a pas à choisir, car,
selon la nature des textes à composer, l’une est préférable à
l’autre…
3.
La première (retenue par l’I.N… mais de façon très
partielle, très insuffisante…) consiste à n’utiliser que des
guillemets dits français.
4.
La seconde hiérarchise deux et éventuellement trois sortes de
guillemets (« français », “anglais”, ‘faux
allemands’).
5.
Avis personnel… Dans la méthode hiérarchique, le troisième
niveau est le plus souvent inutile. Le recours (même abusif) à
l’ital l’élimine avec élégance.
À
Typographie, du 10 au 19 novembre 1998.
P.
CAZAUX :
Jean-Pierre Lacroux disait : « Les guillemets continus ».
Qu’est-ce que tu entends au juste par là ? (Oui, je
sais, par là t’entends pas grand-chose…) Mais encore ?
Je
vais te le dire :
« J’entends
un truc qui ressemble à « la prise de la
» smala d’Abd-el-Kader en 1843
» par les troupes du prince
» d’Aumale », ce qui n’est effectivement pas
grand-chose. »
You
see, les petits guillemots qui volent à tire-d’aile le long de
la marge s’appellent depuis bien longtemps des guillemets
continus…
T.
BOUCHE :
Un léger différend apparaît entre Olivier Randier et
moi-même quant à la cruciale question des « guillemets
continus » chers à notre J.-P. L.
Ma
lecture du Maître est la suivante :
Par
exemple : « Il a dit : « mon père
»
bla bla bla bla bla bla bla bla bla
»
bla bla bla bla bla bla ».
Tandis
que celle d’Olivier :
Par
Belenos : « Il a dit : « mon père »
« disait
que bla bla bla bla bla bla »
« bla
bla bla bla bla bla bla ». […]
Ô
Maître, merci de nous extraire de l’erreur dont nous sommes
enduits !
Je
te reconnais bien là, fidèle disciple : ta lecture est la
plus proche de la Vérité. Hélas, la perfection n’est pas de ce
monde, même chez les meilleurs, et ton point final hors
guillemets me fout grandement les boules.
Je
préfère ceci :
Par
exemple : « Il a dit : « Mon père
»
disait que bla bla bla bla bla bla
»
bla bla bla bla bla bla. »
Dans
ton exemple (vicieux), le dernier guillemet ferme à la fois la
citation de premier niveau et la citation seconde.
Autre
exemple, maybe plus clair :
Un
mot pour : « Bla bla bla bla bla
bla
bla bla, et il a dit : « Mon père
»
disait que bla bla bla bla bla bla
»
bla bla bla bla bla », ce qui prouve
que
son papa blaguait. »
II.
Ponctuation et citations
À
Typographie, du 8 au 17 mars 1999.
J.-D.
RONDINET :
Ça donnerait : Louis XIV a écrit : « L’État,
c’est moi » (Libération, 2 mai 1713).
Éventuellement.
Dans le cas où, le 2 mai 1713, Lib[ér]ation aurait
publié ceci : « L’État, c’est moi. » en
attribuant, d’une façon ou d’une autre, cette formule à Louis
XIV.
J.-D.
RONDINET :
Mais nous éviterons : Louis XIV a écrit :
« L’État, c’est moi. » (Libération,
2 mai 1713.)
Tiens…
pourquoi éviter le meilleur ?
Dans
le cas où, le 2 mai 1713, Lib[ér]ation aurait
précisément publié ceci : Louis XIV a écrit :
« L’État, c’est moi. »
J.
ANDRÉ :
Histoire de compliquer un peu : s’il s’agit d’un titre,
on ne met pas de point à la fin. Donc si on cite le titre,
on écrit : Louis XIV a écrit : « L’État,
c’est moi ». Avec un point extérieur ? Où est
alors le meilleur ?
Le
meilleur, c’est l’ital, sans guillemets, sans deux-points…
puisque c’est un titre. Simple…
J.-D.
RONDINET :
Pourquoi veux-tu « respecter » ce point à tout
prix dans ce contexte, alors que tu le sauterais sans état
d’âme dans : « L’État, c’est moi », a dit
Louis XIV. Ou dans : « L’État, c’est
moi » : Louis XIV le dit. Ou dans : Qui
a écrit « L’État, c’est moi » ? Qu’est-ce qui
est si important dans cette ponctuation-là ?
Mais…
mais… ces exemples (irréprochables…) n’ont rien à voir avec le
précédent… qui attribuait la publication d’une citation (d’un
mec, Louis XIV) à une source (différente : Lib[ér]ation,
2 mai 1713).
Ce
qui me semble important, c’est de baliser avec
précision :
a)
ce qui est attribuable au mec en question (facile) ;
b)
ce qui revient à la source qui reprend ce qu’a dit le
mec ;
c)
ce qui appartient au gugusse qui fait référence à une source
citant un mec…
Comme
tu le sais, le point b) passe souvent à l’as au profit du
point c)… C’est comme ça que se fabriquent beaucoup de livres…
Bé, j’aimions point trop ça… C’est très chiant à débusquer ces
saletés. C’est même souvent impossible (faute de temps, de
moyens… et, bien sûr, de volonté). Voilà pourquoi j’accorde de
l’importance à des broutilles ponctuationnelles.
P.
JALLON :
Le point final serait l’exception qui confirme la
règle : s’il termine effectivement la phrase citée, il
se met avant le guillemet fermant.
Oui…
avec des nuances. Il faut aussi que la citation ait commencé
par le premier mot d’une phrase (la même ou une précédente…),
bref, que la citation soit composée de phrases complètes.
Et
encore… être complet et final ne suffit pas toujours… Faut
aussi être intègre (en soi, donc pas nécessairement fidèle…)
et indépendant (pas être à la remorque de machins trop
intégrés).
[Exemple :]
Dieu dit : « Que la lumière soit », et la
lumière fut. — Selon Jérôme, Dieu aurait dit :
« Fiat lux ! », et, surprise, « la lumière
fut ».
Dans
l’exemple précédent, « la lumière fut » achève la
phrase citée et la phrase dans laquelle elle s’inscrit, et
pourtant le point final est chassé de l’Éden guillemétique.
Sauvons-le :
Au commencement, nous lisons : « Dieu dit :
“Que la lumière soit”, et la lumière fut. »
Autres
exemples… Pour lui, « tout le monde peut en faire autant.
Il suffit de fermer les yeux ». Il a dit : « Et
puis d’abord tout le monde peut en faire autant. Il suffit de
fermer les yeux. »
P.
CAZAUX :
… Et quand il m’a crié « Je vous aime ! »
j’ai cru défaillir.
Oui…
mais de bons (quoique surponctueurs) auteurs préconiseraient
plutôt ceci : […] Et, quand il m’a crié « Je vous
aime ! », j’ai cru défaillir.
Cas
très différent de : « Je vous aime ! »
hurla-t-elle. Je défaillis, ou peu s’en fallut.
J.
TOMBEUR :
Blague (douteuse) à part, j’aimerais mieux : Et j’ai
cru défaillir lorsqu’elle m’a crié : « Je vous
aime ! » […]
La
formule que j’ai l’air de défendre est surponctuée (il me
semble l’avoir précisé), et je n’ai pas critiqué
celle-ci : […] Et quand il m’a crié « Je vous
aime ! » j’ai cru défaillir. J’ai simplement voulu
illustrer le fait que la séquence point
d’exclamation-guillemet-virgule est envisageable, possible,
correcte. Lourde si tu veux, mais correcte. Par ailleurs, je
te signale que ta formulation est assez peu réaliste… En dépit
des apparences, elle est beaucoup plus complexe que la mienne
et met en œuvre une chronologie à rebours.
J.
TOMBEUR :
Bref, je crois profondément qu’il est possible d’imaginer
différentes modalités d’expression en jouant sur la
ponctuation.
C’est
certain. Encore faut-il connaître les règles du jeu. Pas de
quiproquo ! Je ne dis pas qu’il faut nécessairement
respecter les règles. Je pense même le contraire :
connaître la règle du jeu est indispensable pour bien
l’enfreindre, pour bien tricher. Tu sais, la plupart des
prétendues « modalités d’expression » sont de
simples fautes. Surtout dans les textes où
« expression » est un bien grand mot… c’est-à-dire
dans 99,999 % des textes.
J.
TOMBEUR :
Quant à imaginer que le lecteur les perçoive à l’identique,
c’est une tout autre histoire…
Il
faut faire confiance aux lecteurs (il y a parmi eux des types
assez fins). C’est des auteurs qu’il faut se méfier…
P.
JALLON :
En effet, je trouve peu élégant le schéma qui consisterait à
écrire comme suit : « Phrase 1. Phrase 2. Phrase
3 » (Auteur, Référence).
C’est
plus qu’inélégant… c’est malencontreux.
Attention !
Ceci est correct : Blabla « blabla »
(Référence).
Le
pis, c’est évidemment : « Blabla (Référence). »
La
règle peut se résumer (bêtement) ainsi :
« Blabla. » (Référence.) Blabla.
Les
cas particuliers sont nombreux, mais aucun n’est bien méchant.
Exemples :
Blabla : « Blabla » (Référence), blabla.
Blabla : « Blabla « bla » (Référence),
blabla « bla » [Référence], blabla. »
(Référence.)
Ces
pinailleries formalistes sont finalement très
soixante-huitardes… puisqu’elles visent à répondre au
célèbre : « D’où tu parles, toi ? »
J.
DRILLON :
On devrait pouvoir écrire : Il a dit : « Je
viens. » ! Ou : A-t-il dit : « Je
viens. » ? Vœu pieux…
Vœu
impie… Le chemin de la « logique graphique » est
séduisant mais où nous conduira-t-il ? Je redoute ceci,
qui répond me semble-t-il au même souci : « Je
viens. » dit-il. Il a dit : « Je viens. »
et il n’est pas venu. Elle a dit « Je viens. » puis,
se ravisant, « Non, pas encore. »
Je
ne crois pas que les lecteurs aient besoin d’un tel surcodage.
Dans certains cas, le souci logique de l’auteur est sans
espoir. La double interrogation, par exemple, n’a pas à être
impérativement signalée pour être perceptible. Comment
ferait-on à l’oral ? Le problème orthotypographique est
de bien choisir l’emplacement du point d’interrogation.
Quand
l’ambiguïté ne peut être levée que par une profusion hideuse
et proprement « illogique » de signes de
ponctuation, y a pas de mystère : la phrase est mal
foutue, faut la récrire…
Je
suis certain que nous sommes d’accord sur ce point… Ne
tripotons pas les conventions typographiques dans l’unique
dessein de fournir des béquilles aux maladroits.
P.
JALLON :
Patrick Cazaux a-t-il écrit « A-t-il dit :
« Viendrai-je ? » ? » ?
Salaud !
t’as été rapide sur ce coup… « Pas mieux », comme on
dit dans un jeu à la con !
Bravo !
Je te pardonne tout, même l’OUA !
Quand
même… tu m’expliqueras un jour si ta marche est aussi assurée
dans un titre en grandes caps, du genre : « L’OUA
DIT OUI ».
(T’as
remarqué ? C’est un exemple où le point final est
étrange…)
À
Typographie, le 21 janvier 2001.
T.
BOUCHE :
Je viens de taper cette phrase : Je lis ailleurs
que « les préoccupations de l’association GUTenberg ont
évolué du support aux utilisateurs de LaTeX vers une
« évangélisation de XML ».
Je
me pose des questions sur la place du point. Si j’avais
utilisé le système “ ”, ça aurait donné ceci : Je
lis ailleurs que « les préoccupations de l’association
GUTenberg ont évolué du support aux utilisateurs de LaTeX vers
une “évangélisation de XML”. » Le point est à
l’intérieur du guillemet de premier niveau, mais à
l’extérieur du second.
Que
doit-on faire quand on identifie les deux derniers
guillemets, alors qu’ils ne devraient pas être du même côté
du point ?
À
la Drillon ? « Évangélisation de XML ».
» ?
Comme
cela a déjà été dit (par Gilles Perez), le point final est à
l’extérieur des deux guillemets (séparés ou confondus…) dans
ton exemple.
Passons
donc directement au « système attribué à Drillon »
et voyons où il nous conduit : « Que penser d’une
phrase telle que « Je lis ailleurs que « les
préoccupations de l’association Gutenberg ont évolué du
support aux utilisateurs de LaTeX vers une
« évangélisation de XML ». » ? »
Des pratiquants ?
À
Typographie, le 13 août 2001.
T.
BARUCHEL :
Ma femme se trouve confrontée au problème suivant (dans son
travail de D.E.A.) : Machin a écrit ceci :
« Ceci est une phrase complète. » (On la lit
dans : Machin, Titre, p. 29 sq.). Ceci
est une deuxième phrase.
Qu’il
y ait trois points me choque.
Vous
avez raison, il y en a un de trop… non parce qu’ils sont
trois… parce que l’un d’eux est fautif : Machin a
écrit : « Ceci est une phrase complète. » (On
la lit dans : Machin, Titre, p. 29 sq.) Ceci est
une deuxième phrase.
T.
BARUCHEL :
Le premier est mis car il fait partie de la citation
(peut-on le supprimer, alors que la phrase est citée en
entier ?).
Il
ne faut surtout pas le supprimer.
T.
BARUCHEL :
Le second est obligatoire (abréviation).
Oui.
T.
BARUCHEL :
Le troisième est là, car cela me choquait de fermer une
parenthèse et de tout de suite mettre une majuscule ;
mais peut-être ai-je tort.
Oui,
vous avez tort… (À dire vrai, ce qui me choque le plus, c’est
votre pédant « sq. »…)
D.
WYART :
Après réflexion, cela semble effectivement mieux, mais je ne
saurais pas l’expliquer. Pourriez-vous détailler le pourquoi
de la chose ? (S’il y en a un…)
C’est
très simple, comme toujours en pareil cas.
1.
Reprenez la formule que je déclare fautive…
2.
Éliminez la parenthèse.
3.
Observez la ponctuation que vous avez sous le nez.
(Je
sais, certains amateurs de lourde redondance et de
« logique » grammaticale préconisent ces atrocités…)
D.
WYART :
Évidemment, Drillon n’explique pas vraiment (il se base sur
l’habitude), mais il dit (plus ou moins, car cette
discussion dans son livre est très touffue) le contraire.
Drillon
analyse admirablement la ponctuation, mais il s’égare parfois
quand il aborde les « conventions typographiques ».
Peut-être s’est-il abreuvé sans méfiance à des sources peu
claires et peu sûres ?
D.
WYART :
Faut-il mettre « suivante » à la place ?
Trop
long… au sein de références bibliographiques.
Éventuellement
« et suiv. ». (Ici, la séquence . ». est
légitime…)
D.
WYART :
Y a-t-il mieux ?
Oui,
beaucoup mieux…
P.
24 sq. > p. 24, 25. P. 24 sqq. > p. 24-26.
(Ou…
p. 24-36, ou… p. 24-43 ou…)
Ça
prend à peine plus de place et c’est plus précis… Le lecteur
est content, il sait où on l’envoie…
Les
« sq. » et les « sqq. » sont d’odieux
gris-gris de pédants-feignants…
III.
Citation d’une note dans un texte
À
Typographie, le 13 août 2000.
A.
HURTIG :
Dans ce cas, je crois que je me contenterais de garder
l’appel de note, de faire un retour à la ligne et de
composer la note avec le numéro de note au début, dans le
même corps que la citation.
Dans
un bouquin faisant, pour son propre compte, appel aux notes et
à leurs appels… bordel en perspective, surtout si les appels
sont similaires. De toute façon, les bonnes solutions
dépendent de la nature de l’ouvrage et de la fréquence de
telles occurrences, et nous sommes ici dans le flou et même
l’ignorance.
Dans
bien des cas (si de telles occurrences sont rares ou, of
course, uniques), le mieux sera d’éliminer l’appel et de
« rédiger » un ersatz férocement explicite, du
genre : « Herbert Machin précise en note :
“Patatipatata.” »
Au
besoin, préciser quel terme de la citation est suivi de
l’appel.