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Véhicule
Bateau.
•••
Le nom propre d’une série de véhicules ou d’un modèle se compose
en romain : une Mégane, deux Safrane, trois Laguna.
•••
Le nom propre d’un véhicule se compose en italique.
Impr.
nat. 1990, Ramat
1994.
Avions
« Le
chef mitrailleur du Pélican I et le mécanicien
l’accompagnaient, moins saouls. » – André MALRAUX,
l’Espoir.
« J’ai
fait de temps en temps de médiocres vers ; c’est un
exercice assez bon pour se rompre aux inversions élégantes,
et apprendre à mieux écrire en prose. »
Jean-Jacques ROUSSEAU,
les Confessions.
Capitale initiale
La
règle veut que chaque vers commence par une capitale initiale.
C’est indiscutable pour la quasi-totalité des œuvres, mais les
poètes ont leurs raisons que les typographes ou leurs épigones ne
sont pas autorisés à ignorer :
« Quel
beau carnage sans colère en ton honneur, regarde :
dans
cette nuit polaire aussi blanche que noire,
dans
ce cœur dévasté aussi bien feu que glace,
dans
cette tête, grain de plomb ou pur espace,
vois
quel vide parfait se creuse pour ta gloire. »
René
DAUMAL,
Poésie noire, Poésie blanche.
Abréviations et chiffres
Épelés
ou lus au long (acronymes), les sigles sont admis sans restriction.
« P.R. et R.P.R., Radicaux, C.D.S.,
Amis
de Lecanuet et de J.J.S.S.,
Paladins
de Ponia, baladins de Chirac,
Petits
rentiers frileux et requins de Ceyrac,
N’avaient
plus qu’un espoir : c’était en l’Élysée ! »
Jean-Michel
ROYER,
d’après Victor Hugo, À la manière… deux.
Les
codes proscrivent les abréviations dans la poésie. Code
typ. 1993 précise même que le compositeur ne doit en
« faire aucune […], lors même que la copie en
contiendrait »… Les poètes ne savent pas toujours ce qu’ils
font. Une abréviation de (feinte) discrétion (S*** se lit Savine
et rime avec mine), due à un spécialiste mal informé de
l’Art poétique :
« Quelqu’un
a-t-il connu Monsieur S***,
Quelqu’un ici ? C’est un gros laid d’assez fadasse mine Et bête aussi… » |
|||
Paul
VERLAINE,
« Un éditeur », Invectives.
|
|||
« Un Jurançon 93 | |||||||||
Aux couleurs du maïs, | |||||||||
Et ma mie, et l’air du pays, | |||||||||
Que mon cœur était aise. » | |||||||||
Paul-Jean TOULET, les Contrerimes. | |||||||||
Alinéas
¶
Si un vers « appartient » à plusieurs interlocuteurs, on
le compose en escalier. On renfonce chaque segment de la valeur
exacte du précédent, plus une espace :
Vous ? Moi. Je ne sais comment se fit l’affaire.
L’alinéa
au sein d’un vers engendre la même disposition :
« Un
prisonnier, un
juge, un fantôme ; l’ancêtre !
C’est
Fabrice.
C’est
Fabrice. On l’amène à la merci du maître. »
Victor
HUGO,
la Légende des siècles.
Veuve
Ligne creuse
Ville et village Article dans les noms propres, Géographie, Trait d’union.
« Souvenez-vous
que les murs des villes ne se
forment que du débris des maisons des champs.
À chaque Palais que je vois élever dans la capitale,
je crois voir mettre en mazures tout un pays. »
Jean-Jacques ROUSSEAU,
Du contrat social.
Pluriel
Seules
sont des pluriels les dénominations commençant par un article
défini pluriel : Les Andelys sont situés dans l’Eure.
Quels
que soient les éléments pluriels qu’ils incluent, tous les autres
noms de localités sont des singuliers : Ax-les-Thermes est
une station pyrénéenne, Forges-les-Eaux est en Normandie,
Salins-les-Bains est dans le Jura. Carrières-sur-Seine est peuplé
(ou peuplée) de Carillons (ou de Carriérois).
Saintes-Maries-de-la-Mer est une commune des Bouches-du-Rhône.
Trois-Rivières est situé (ou située) au Canada.
Grevisse
1986, bien que sa formule manque pour le moins de
précision : « Les noms de localités qui contiennent
l’article pluriel sont considérés comme des pluriels. »
Genre
Quiconque
a soif de certitude ne se désaltérera pas ici. Le genre des villes
est un des hauts lieux de la liberté onomastique. Hormis celles
dont le nom contient un article (singulier), les villes ne se
laissent pas facilement attribuer un genre immuable.
Sont
a priori des noms masculins : Le Caire, Le Havre,
Le Vésinet.
Sont
a priori des noms féminins : La Ferté-Alais,
La Havane, La Nouvelle-Orléans.
Lorsqu’un
article pluriel précède un « nom commun courant », le
genre est aisé à deviner : Les Sables-d’Olonne sont
situés sur l’Atlantique.
Les
« saints » sont d’un grand secours : Saint-Étienne
et Sainte-Menehould ne sont pas du même genre.
Pour
les milliers de villes dont le nom ne contient aucun élément d’un
genre clairement identifiable, on suggère parfois de se fier à la
dernière syllabe, à la rime. Syllabe muette, le nom a de grandes
chances d’être féminin ; syllabe sonore, le nom a de grandes
chances d’être masculin. Certains auteurs présentent comme une
vieille règle française l’attribution du féminin aux noms de
villes se terminant par une voyelle, du masculin à ceux qui se
terminent par une consonne. Ces deux « règles » sont
souvent contradictoires : Londres (syllabe muette, consonne),
Marseille (syllabe muette, voyelle).
Même
si elles peuvent aider parfois à « se faire une idée »,
il est préférable de les considérer toutes les deux avec
circonspection ou, mieux, de les oublier.
Pour
deux raisons :
—
Si l’on tente de vérifier leur pertinence avec des exemples
indiscutables, on obtient ceci : Le Caire,
Le Havre, Les Sables-d’Olonne, Saint-Étienne (voyelle,
syllabe muette… masculin) ; La Ferté-Alais,
La Nouvelle-Orléans, Sainte-Menehould (consonne, syllabe
sonore… féminin) ;
—
Selon les circonstances (syntaxe et niveau de langue, registre),
les noms de villes peuvent être soit masculins, soit féminins…
Grevisse
1986.
Berthier
& Colignon 1979, Typogr.
romand 1993.
Accords et syntaxe
Déterminées
occasionnellement par un article défini, les villes adoptent de
préférence le masculin. Certains adjectifs antéposés (grand,
vieux) accentuent cette tendance.
Londres
est belle (ou beau) sous le brouillard, le Londres de Dickens est
moins vert que la Normandie de Maupassant, le Grand Londres a été
liquidé par Margaret Thatcher.
Marseille
est belle sous le soleil, il regrette le Marseille des années
trente, Bruxelles est belle (ou beau) sous la drache.
Le
vieux Bruxelles a été liquidé par les spéculateurs et les
architectes.
Alger
est blanc sous le soleil, aussi l’appelle-t-on Alger
la Blanche.
Précédées
de tout, toutes les villes renoncent au féminin, y compris
celles dont le nom inclut un article défini féminin : tout
La Rochelle est saisi d’allégresse, toute la ville en parle.
Remarque.
— « Tout » signifie ici « toute la population
de » et non « l’ensemble de la ville de ». C’est
donc à tort que l’on écrit parfois : [« Tout Londres est
en flammes. »]
Tout
Paris est dans les rues, le Tout-Paris.
Quelques
villes italiennes sont très attachées à leur genre. Mais il y a
des limites à tout :
—
la Florence des Médicis, la Venise des doges, tout Venise est
enrhumé ;
—
la Rome des papes, Rome est belle sous les Césars, on circule mal
dans le Grand Rome, tout Rome est à Ostie.
Lorsque
le nom d’une ville est employé pour désigner une équipe ou un club
sportifs, le masculin est de rigueur (même s’il s’agit d’une
équipe féminine) : La Rochelle a été battu au
Havre ; Marseille, affaibli, renonce à rencontrer
Valenciennes.
Registres
Le
français littéraire privilégie le féminin ; le français
courant ou technique, le masculin.
Dans
l’accord des adjectifs et des participes, toute grande localité
« masculine » peut s’approprier le genre féminin :
Dakar est beau (ou belle) sous les nuages ; Oslo est beau (ou
belle) sous la neige.
Attention
à ne pas confondre nom propre composé (trait d’union obligatoire)
et surnom (pas de trait d’union) : Louvain-la-Neuve,
Sainte-Foy-la-Grande, Sidi-bel-Abbès ; Alger la Blanche,
Albi la Rose.
Article
L’article
prend la majuscule, sauf s’il y a contraction :
Le Havre, La Nouvelle-Orléans, La Rochelle,
Les Sables-d’Olonne, Le Tréport. Le port du Havre ne
doit rien à Le Nain ; je vais au Tréport puis aux
Sables-d’Olonne.
Les
toponymes et les patronymes sont soumis à des règles très
différentes : le classement alphabétique des localités ne
tient pas compte de l’article : Havre (Le), Rochelle (La).
Cet usage est absurde. D’excellents typographes (Règles
Hachette 1924, Leclerc
1939) ont suggéré d’écrire comme jadis : le
Havre, la Rochelle. Les lexicographes ne les ont hélas pas suivis.
Surnoms
La
Ville éternelle (Rome), la Ville Lumière (Paris), la Ville sainte
(Jérusalem).
Impr.
nat. 1990 {la Ville Éternelle}, Tassis
1870 {la ville éternelle}.
I.
Présence et graphie de l’article
dans les noms de lieux
À
France-Langue, les 27 et 28 juillet 1998.
EDN :
Qui saurait me donner une réponse circonstanciée concernant les
contractions d’articles pour les communes françaises ?
Il
n’y a pas ici de « règle particulière »… simplement la
règle générale du français en pareil cas… donc… contraction
« normale » des articles définis initiaux (la mairie du
village, la mairie du Havre, la mairie des Essarts), à l’exception
évidemment et très « normalement » des articles élidés
(la mairie de L’Albenc) et des articles féminins singuliers (la
mairie de la commune, la mairie de La Rochelle)…
C’est
une des raisons pour lesquelles je milite (sans espoir…) pour le
retour à la minuscule initiale des articles définis initiaux dans
les noms de localités… L’autre étant que ces toponymes sont
classés alphabétiquement sans tenir compte de l’article…
EDN:
Le Tremblay : mairie de Le Tremblay ou mairie du
Tremblay ? Les Essarts : mairie de
Les Essarts ou des Essarts ?
Le Mée-sur-Seine : mairie de Le Mée s/Seine ou du
Mée-sur-Seine ?
Les
mairies du Tremblay, des Essarts, du Mée-sur-Seine (jamais de
« s/ » ou de « / »…).
« Retour
à la minuscule initiale des articles définis initiaux dans les
noms de localités… » : précision… C’est bien sûr déjà le
cas pour les hameaux, les quartiers, les lieux-dits… comme
la Défense ou la Villette…
À
F.L.L.F., le 5 janvier 2000.
H.
CHAUVET :
J’aimerais savoir si, dans les noms de villes composés, le trait
d’union est obligatoire, interdit ou facultatif.
Obligatoire,
sauf après l’éventuel article initial (on comprend pourquoi).
Ah !
j’oubliais la pitrerie techno… sauf pour les têtes pensantes de la
Poste…
À
F.L.L.F., le 23 mai 2000.
D.
DIDIER :
Je prends un guide régional et je lis : Veuve (la),
Islettes (les), Marne ; Riceys (les), Haute-Marne ;
Saulsotte (la), Aube.
Si
j’ouvre un annuaire, je retrouve la même présentation.
Eh
bien, votre guide régional et votre annuaire commettent quatre
erreurs. Ces quatre localités sont des communes, donc leur article
initial doit prendre une majuscule, même lorsqu’il est postposé et
mis entre parenthèses. Ça, c’est une règle (alors qu’aucune
« règle » ne détermine « mécaniquement » le
genre des noms de ville…).
D.
DIDIER :
Je pourrais répéter la même opération pour une autre
province : Chapelle-devant-Bruyères (la), Val-d’Ajol (le),
Vosges.
Encore
deux communes, donc deux erreurs…
D.
DIDIER :
Et un festival de piano peut se dérouler à Roque-d’Antéron (la).
Roque-d’Anthéron
(La).
D.
DIDIER :
À ne pas confondre avec les Laroquebrou ou Laroque-Timbaut.
L’agglutination de l’article peut jouer des tours…
Non,
l’agglutination de l’article ne joue aucun tour et ne pose aucun
problème orthotypographique : elle a eu lieu, c’est tout.
D.
DIDIER :
Je ne cherche pas à infirmer une règle qui n’existe d’ailleurs
pas vraiment…
Si,
si…
D.
DIDIER :
… mais je constate que les noms de grandes villes ne sont pas
soumis aux mêmes normes orthotypographiques que les petites
communes et les hameaux, qui sont sujets à l’absence de
majuscule pour l’article.
Non,
la démarcation ne se situe pas entre les « grandes » et
les « petites » localités (ce « critère »
n’est pas opérationnel… il est donc irrecevable…). Elle passe
entre les communes et les hameaux, les lieux-dits.
D.
DIDIER :
Est-ce parce qu’ils échappent aux dictionnaires courants ?
L’importance numérique et économique d’une agglomération
permettrait-elle de ne pas se définir simplement comme un
lieu-dit sur le modèle du Blanc (mont), du Léman (lac) ? Ou
aurions-nous encore affaire à l’article de notoriété ?
Rien
de tout ça — encore que la comparaison des lieux-dits avec les
toponymes non administratifs, disons « géographiques »,
soit en partie pertinente —, mais je retiens votre première
hypothèse, car elle explique « en creux » le phénomène
que vous avez observé dans des guides « régionaux ».
Les
dictionnaires courants (ou spécialisés…), ainsi que tous les
ouvrages de référence sérieux sont en général écrits, composés,
révisés, corrigés par des gens qui connaissent les conventions du
français écrit.
C’est
plus rarement le cas pour les guides régionaux, les annuaires et
toutes ces sortes of choses…
Or,
par nature, les dictionnaires d’usage courant n’offrent des
entrées qu’aux localités d’une certaine importance… Cela ne
signifie nullement que les saines conventions qu’ils respectent ne
s’appliquent pas aux réalités que faute de place ils ignorent…
D.
DIDIER :
Mais alors comment expliquer dans certains cas la disparition de
l’article, notamment devant les différentes
« Villeneuve », « Villefranche » ?
Comme
son agglutination, la disparition de l’article est un phénomène
d’ordre « linguistique »… Les conventions
orthotypographiques — qui n’ont pour ambition que de faciliter la
vie du lecteur — n’y sont pour rien, n’expliquent rien (mais elles
sont explicables)… Modestes, elles font où on leur dit de faire,
rien de plus…
À
F.L.L.F., le 1er février 2001.
R.
O. : « Demain, je serai sur… » Douai.
Ça
vaut mieux que d’être sur Menet (Cantal), mais il est agréable de
vivre sur Manvieux (Calvados) et, pour une dame, d’être sur
Essertenne (Saône-et-Loire).
II. « À » Arles, « en » Avignon…
À
France-Langue, du 18 au 27 mars 1997.
BILOU :
Je suis certain d’un poème qui disait : « En
Arles, où sont les Alyscamps… » Mon enfance marseillaise a
toujours entendu en Arles, en Avignon…
Justement
non… (Mais ça ne change rien, vous avez raison sur le fond…)
Paul-Jean Toulet a écrit un poème, « En Arles » qui
commence ainsi :
« Dans
Arle, où sont les Aliscams,
Quand
l’ombre est rouge, sous les roses,
Et
clair le temps […] »
Ce
« Dans » est magnifique. (Arle n’est pas une étourderie
de ma part.) La préposition « en » s’employait jadis
devant les noms de villes. Elle a résisté devant Avignon pour la
raison indiquée par André Bourlakoff (enclave papale). On peut
supposer qu’elle a résisté devant Arles pour une raison
similaire : Arles n’est pas qu’une ville, ce fut un royaume.
« En
Avignon » et « en Arles „ sont aujourd’hui
considérés comme des provincialismes ou dénoncés comme affectés.
Peut-être, mais ils sont charmants et élégants.
BILOU :
Ce qui est clair, c’est que les chercheurs de normes ont tort
face à l’usage, et que les dictionnaires outrepassent souvent
leur rôle. Parce que qui dérangé-je (en voilà une normale et
ridicule) en disant « en Arles » ?
Je
suis bien d’accord avec vous : « en Arles » est
charmant et ne dérange personne.
Là
où je ne vous suis plus, c’est lorsque vous attribuez la
condamnation de cette préposition aux seuls « chercheurs de
normes ». Elle est surtout vilipendée (à tort) par les
« observateurs de l’usage ».
Sur
ce point précis, voici ce qu’écrivait Albert Dauzat, linguiste
très respectable et prompt (avec raison) à dénoncer les oukases
puristes :
« Les
fausses élégances comme “en Avignon” ou “à skis” — solécismes non
plus vulgaires, mais prétentieux — sont plus coriaces :
espérons qu’avec de la ténacité nous aurons leur peau. »
Brrrrr…
Ça fait peur… On n’en est plus aux timides et ridicules « Ne
dites pas », on sort les couteaux afin de faire respecter
l’usage…
Pour
être honnête, précisons que les arguments développés ensuite par
Dauzat sont intéressants :
« Ce
fut d’abord une mode félibréenne. Évidemment on dit en
Avignoun en provençal (en face d’az Ais, “à Aix”),
mais le provençal n’est pas le français : à chacun sa
syntaxe ! Mistral lui-même, à la fin de sa vie, avait
formellement condamné ce solécisme. […] »
La
suite confirme que souvent l’usage est (heureusement…) imposé par
des chercheurs de normes d’un autre genre, les grammairiens :
« Cet
exemple est en effet un de ceux qui illustrent le mieux le rôle
des grammairiens. Comme dans d’autres cas, la règle a été inspirée
par la tendance du français à spécialiser les particules dans des
emplois précis : le grammairien a rendu l’usage plus
conscient et l’a codifié. Le premier, Meigret, dès le XVIe siècle,
bientôt suivi par Ramus, dégage la règle qui oppose “à” devant nom
de ville à “en” devant nom de pays. Elle est précisée par Maupas,
dont la grammaire fit autorité en 1607, par Dupleix (1645), et
appliquée par les Messieurs de Port-Royal, même aux noms bibliques
et antiques, pour lesquels la tradition latine conservait encore
“en”. Sous Louis XIV le tour avec “en”, considéré comme
vieilli par Ménage et par l’Académie, est condamné par tous les
grammairiens, Bouhours en tête, et autorisé seulement comme
licence poétique (ainsi s’explique “en Argos”, qu’on trouve une
fois chez Racine). Telle est encore la position de Littré.
[…] »
« Historiquement,
“en Avignon” eut sa raison d’être comme nom de pays jusqu’en 1789,
quand il y avait un État papal (on entendait : dans l’État
d’Avignon) — tout comme “en Alger”, qui signifia “en Algérie”
jusqu’au jour où fut créé le mot “Algérie” (sous
Louis-Philippe). »
Bon…
Les prépositions sont spécialisées… mais pas tant que ça. Si le
nom d’un pays est masculin singulier (ce qui n’est pas rare…), on
emploie « au » et non « en »… : au Soudan, au
Portugal, au Mexique, au Luxembourg (même si « en
Portugal » ou « en Danemark » survivent faiblement,
comme « en Arles », sans déranger personne, sauf
quelques observateurs impartiaux de nos usages).
Remarque
annexe… En s’appuyant sur Meigret ou Ménage, les observateurs de
l’usage emploient les mêmes méthodes et les mêmes arguments que
les puristes.
Je
me demande d’ailleurs comment Dauzat, après avoir évoqué la
spécialisation des particules pour condamner « en
Avignon », justifierait le passage de « en
Portugal » à « au Portugal » ? Peut-être
l’a-t-il fait ? Mais je n’ai pas le temps d’aller voir ça de
plus près…
À
F.L.L.F., le 2 août 2000.
D.
B. : Il semble que ce soit à Daudet qu’on doive la
recrudescence de « en Avignon » et « en
Arles ».
Bon,
alors… je ne la trouve plus charmante… ni élégante !
Ce
snobisme bouseux est à chier…
III.
Genre des villes
À
F.L.L.F., le 23 mai 2000.
D.
B. : « La Rochelle a été battu au Havre. » […]
Dans ce cas, on s’éloigne un peu du vrai nom de ville pour se
rapprocher des noms de n’importe quoi.
Oui,
mais on s’en rapproche très modérément. Dans le cas d’une équipe
sportive désignée « en raccourci » par le nom de la
ville qu’elle représente, celui-ci conserve en grande partie son
poids d’origine (surtout pour les chauvins de clocher…).
Ce
qui n’est évidemment pas le cas avec les noms de navires (sujet
difficile…) ou de troquets.
Les
choses sont simples avec les formes déterminées ou complètes
(Turin a été battu, la Juventus de Turin a été battue) mais elles
se compliquent avec les sigles… même partiels… Que faire avec
l’A.S.S.E. ou l’A.S. Monaco ? Ou, dans une discipline que je
préfère, l’USAP ? Quand on ignore la signification de ces
initiales (ce qui est fréquent, même chez les
« spécialistes »), on se rabat parfois sur le masculin
systématique. C’est regrettable… mais c’est amusant, car la
manœuvre est à la fois dans l’air du temps et contre lui…
À
F.L.L.F., le 17 décembre 2001.
L.
BENTZ :
Il y a des exceptions (généralement par métonymie), ainsi :
« La Rochelle est un notable port de pêche », cité
dans le Bon Usage de Grevisse et Goosse (13e éd.,
1993, § 462).
Où
est l’exception ?…
Dans
« cette ville est un notable port de pêche », le genre
du mot ville serait-il une exception ?
Quelle
est précisément la formulation de Mr Goosse ?
L.
BENTZ :
« Le masc. se rencontre pourtant : “Équipé d’un bassin
de plaisance, La Rochelle est un notable port de pêche” (Grand
Dict. enc. Lar.). [N. D. F. […] Le rédacteur pense sans doute à
“port”]. »
C’est
très différent de ce que vous donnez dans la FAQ… où il manque ce
qui illustre la prétendue exception.
Cela
dit, si le rédacteur a pensé à « port », il a eu une
étrange pensée… comparable à celle qui conduirait à écrire :
« Équipé d’un bassin exceptionnel, Brigitte Bardot est un
notable monument du cinéma français. »
S’il
y a une explication (et non une exception), elle tient plus au
registre qu’à la syntaxe.
Vin Saint.
« Seigneurs,
l’homme est divin. / Dieu n’avait
fait que l’eau, mais l’homme a fait le vin ! »
Victor HUGO,
« la Fête chez Thérèse », les Contemplations.
À
France-Langue, le 18 février 1997.
CLAUDE-JEAN :
Ce qui m’intrigue aussi est ce « s » à la fin
du mot. Écrit-on « le chiroubles » ?
Oui,
on écrit le ou un chiroubles comme on écrit le ou un bordeaux.
Chiroubles
(toponyme) est une commune où l’on produit un excellent beaujolais
(vin). Le chiroubles (vin) est produit dans une commune du
Beaujolais (toponyme).
Pourquoi
le « s » de Chiroubles vous intrigue-t-il davantage que
celui de Beaujolais ?
À
F.L.L.F., le 10 avril 2001.
C.
CHALAND :
Pourtant un trouble en moi subsiste : sur quel critère le Larousse
classe-t-il Château-Lafite ou Château-Latour au rang des noms
propres, avec majuscules, donc ?
Sur
le même critère (ou presque) qui fait accorder une majuscule à
Président mais non à camembert, à Société mais non à roquefort…
Le
Château-Lafite et le Château-Latour sont des pauillacs (premiers
crus !), des vins de Pauillac… des bordeaux comme on en fait
peu… Château-Lafite est assimilable à une marque, pauillac est une
appellation.
Virgule
Points
de suspension, Ponctuation.
¶ Espace
Jamais
d’espace avant la virgule.
Jadis,
on mettait une espace d’un point avant la virgule dans les lignes
espacées « normalement » (sauf après les lettres r,
v et y « qui portent un blanc suffisamment
fort par en bas », Lefevre
1883) et l’on s’en abstenait dans les compositions
serrées.
Des espaces avant les virgules ?
À
Typographie, du 10 au 13 novembre 1998.
J.
ANDRÉ :
J’ai un petit bouquin non daté mais je présume qu’il date des
années 1935 environ. Il s’agit du Petit Manuel de
composition de Louis Chollet, attaché à la maison Mame, édité à
Tours, Maison Mame et fils. Il y dit : « La virgule,
dans une ligne espacée normalement, doit être séparée par une
espace de un point, ainsi que les astérisques et les appels de
notes sans parenthèses ; le point-virgule, les points
d’interrogation et d’exclamation, par une espace de un point et
demi ; les deux-points, par deux points à gauche contre
trois points à droite. »
S’il
date de 1935… c’est une réédition… Chollet a écrit son manuel dans
les dernières décennies du XIXe.
Je n’ai pas la date exacte sous la main.
À
mon sens, le jeu sur l’espace précédant la virgule est
essentiellement lié à la compo manuelle. Rien n’interdit de le
ressusciter : manié avec mesure et délicatesse, il était loin
d’être con…
Encore
faut-il ne pas s’imaginer que tous les blancs que l’on perçoit
avant les virgules dans des livres anciens sont des espaces… Dans
bien des cas, il s’agit de l’approche du signe, approche parfois
énorme ! Voir, par exemple, les critiques de Frey (p. 49),
qui demande aux fondeurs de tailler à vif !
J.-P.
GODEFROY :
D’autre part quelqu’un, il y a peu, […] pensait que les espaces
précédant les virgules étaient un problème d’approche, mais le
point n’est jamais précédé d’une espace.
Cela
n’infirme pas le fait que l’approche naturelle jouait un rôle
éminent dans le cas de la virgule… (« approche
naturelle » pris évidemment au sens plombé de l’expression…
c’est-à-dire non modifiable… sauf à la lime et à la servante de
JiDé !). Le blanc que l’on qualifie un peu vite d’espace
était parfois l’approche naturelle (mais excessive…) du signe… et
celle de son prédécesseur. N’oublions pas non plus que jadis on
composait moins serré que naguère…
Je
reviens à une source, parmi d’autres, que j’ai mentionnée (A.
Frey, article « Approche », publié en 1835). En voici un
extrait :
« Fournier
veut qu’on “tienne les ponctuations un peu grosses, à l’exception
du point [hihi…], parce qu’il se trouve toujours une espace entre
elles et le mot qui les suit [il est con, ce Fournier…]”.
« Si
tous les fondeurs s’astreignaient à cette règle, il y aurait peu à
redire ; mais quelques-uns, par des motifs qui les justifient
peut-être tout en accusant l’incurie des imprimeurs, tiennent
diverses ponctuations et encore d’autres sortes tellement grosses,
qu’ils évitent le bien qu’avait en vue notre typographe, et
aggravant le mal qu’il paraît n’avoir pas entièrement prévu. On
fera donc ici cette recommandation […]
« Laissez
donc presque à vif :
« 1o.
la parenthèse […]
« 3o.
la virgule des deux côtés,
« car
une quantité notable de lettres des trois alphabets romains, y
compris les chiffres, décrivent par leurs pointes et leurs
circuits, à la base de l’œil, l’espace qu’il faut observer à la
composition, et cela d’autant plus que même un certain nombre de
ces lettres, plus particulièrement encore pour l’italique, portent
un blanc déjà trop fort pour la virgule. »
Fin
de citation. Je ne conteste pas la présence d’espaces… Je suis
même de ceux qui regrettent le temps où l’on pouvait encore
justifier en introduisant des espaces diverses avant les
virgules ! Je dis que certains blancs, aujourd’hui étonnants,
n’ont pas besoin d’elles pour s’expliquer… Nuance !…
Voie et espace public Adresse, Jardin, Monument, Particule.
Les
règles qui suivent s’appliquent à toutes les catégories de voies
et d’espaces publics.
•••
Les termes génériques (rue, avenue, boulevard, place, passage,
bois, etc.) demeurent des noms communs et se composent en bas de
casse ; les termes spécifiques sont considérés comme des
dénominations propres et prennent une capitale initiale : rue
Neuve, boulevard Victor, place Blanche.
Impr.
nat. 1990, Tassis
1870.
•••
La préposition qui unit le terme générique et le terme spécifique
se compose en bas de casse : esplanade des Invalides,
chaussée de Louvain, passage des Panoramas, rue de Vaugirard.
•••
Les termes des dénominations composées sont liés par un trait
d’union, à l’exception de l’éventuel article initial.
•••
Ils prennent une majuscule initiale, à l’exception des articles
n’appartenant pas aux noms propres, des prépositions (de), des
conjonctions (et), des pronoms (qui) : rue du Chat-qui-Pêche,
avenue du Cimetière-des-Batignolles, rue Chevalier-de-La-Barre,
rue Lucien-et-Sacha-Guitry.
•••
Attention ! Certaines particules précédant des patronymes
sont des articles contractés et prennent par conséquent une
majuscule initiale : rue Du Guesclin, rue du
Grenier-sur-l’Eau, rue La Fontaine, place du
Maréchal-de-Lattre-de-Tassigny, avenue La Motte-Piquet, avenue de
La Bourdonnais, boulevard de Latour-Maubourg, rue de La
Tour-d’Auvergne, chaussée de la Muette, rue
Saint-Jean-Baptiste-de-La-Salle, quai de la Mégisserie, place du
Parvis-Notre-Dame, place du Parvis-du-Sacré-Cœur, avenue de la
Porte-des-Lilas, porte des Lilas, rond-point du Pont-Mirabeau,
pont Mirabeau, rue du Pont-Neuf.
Les
nombres se composent :
—
en chiffres romains grandes capitales pour les adjectifs ordinaux
des souverains : avenue Albert-Ier-de-Monaco,
avenue George-V.
—
en chiffres arabes dans les dates : rue du 8-Mai-1945, place
du 11-Novembre-1918.
—
en toutes lettres dans tous les autres cas : impasse des
Deux-Anges, cour des Trois-Frères, rue des Quatre-Frères-Peignot,
rue des Cinq-Diamants.