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(Pour poser une question, suggérer une amélioration ou signaler une coquille) Typographie, choix éditoriaux, et brève histoire de… l’Opus Lacroussianum Magnum Ce site web et les fichiers qu’il contient sont placés sous Licence Creative Commons (by-nc-nd) |
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•••
Les termes qui désignent les classes et les catégories sociales ne
prennent pas de majuscule initiale : l’aristocratie, la
bourgeoisie, le clergé, la noblesse, le prolétariat, le tiers état.
Guéry 1996,
Impr.
nat. 1990.
••
Enseignement,
armée, fonction publique…
Suivis
du mot classe ou substantivés, les ordinaux se composent
en lettres : je ne voyage qu’en première classe ; il
redouble sa troisième ; elle est admise en
première S ; vous êtes encore deuxième classe ?
•
Cette règle, impérative dans les textes rédigés, n’a pas à être
respectée dans ou sur certains documents (bulletins scolaires,
titres de transport, circulaires…).
•
Il serait ridicule de vouloir l’imposer dans les ouvrages
spécialisés, singulièrement si les sujets qu’ils traitent
impliquent un nombre de classes supérieur à cinq ou six… : la
24e classe, la XIIIe classe.
••
Quelle que soit la nature du texte, si « classe »
précède l’ordinal, celui-ci doit être composé en chiffres (arabes
ou romains, selon les disciplines) : la classe III, la
classe 12.
Classification typographique Police.
La
classification des caractères n’est pas apparue au XXe siècle.
Jadis
on les répartissait selon leur destination, ce qui n’était pas
idiot : caractères de texte ou de labeur, caractères
poétiques, dont l’œil étroit permettait une composition aisée des
vers dans les ouvrages de petit format, caractères de genre,
caractères de fantaisie, caractères d’écriture, caractères
étrangers.
1.
Classification Thibaudeau
La
plus simple, la plus efficace pour les non-spécialistes comme pour
les professionnels.
Quatre
classes fondées sur un critère morphologique unique : la
présence et la forme des empattements :
Les
Égyptiennes se subdivisent en trois sous-classes :
(Rockwell). « Empattements quadrangulaires bruts. »
(Clarendon). « Léger arrondissement intérieur des angles,
opération n’atteignant pas les angles des traits d’empattement
et laissant intacte la caractéristique bien établie du type. »
(Barnum). «Empattements renforcés. Traits intérieurs amaigris. »
2.
Classification Vox
(Samuel-Théodore-William
Monod, dit Maximilien Vox, idole de Lure, qui ne fut guère
troublé, on le rappelle rarement aujourd’hui, par la
« classification » vichyste des races.)
Neuf
classes, fondées sur des critères à la fois morphologiques et
historiques (façon de parler) :
3.
Classification Atypi
(ou… A.Typ.I.) ou… Vox-ATypI.
(Les
mauvaises idées perdurent.)
Onze classes :
La
onzième classe est particulièrement monstrueuse ; on y
trouve de tout : de l’alphabétique, de l’idéographique, du
pictographique. Considérons seulement l’« alphabétique non
latin » ; certains alphabets de la onzième classe se
déclinent selon les classes précédentes : il existe des
polices cyrilliques « linéales », des polices grecques
« mécanes »… donc des polices de classe 11 et 5, 11 et
6, etc.
Taxinomistes
audacieux, nos voxistes-atypistes ne sont pas troublés par ces
équivalents des « batraciens mammifères ». Il ne
s’agit pas en effet de formes de transition présentant certaines
caractéristiques appartenant à deux classes (ce qui est tout à
fait admissible et prévu par Vox), mais de polices répondant
intégralement aux définitions de deux classes différentes…
4.
Type régulier
Frey 1857 : « Tout caractère tellement proportionné et adapté au corps que le résultat, obtenu même sans le secours d’aucun blanc auxiliaire ou interligne, offre un assemblage qui satisfasse complètement à une lecture facile et rapide, en tenant le milieu entre l’agréable et l’utile, selon l’expression de Fournier le Jeune. »
5.
Polices de symboles, de pictogrammes,
d’idéogrammes, d’ornements, de vignettes et d’images :
Ces
signes peuvent subir (si on le souhaite…) les mêmes
transformations que les lettres et les chiffres :
soulignement, mise en italique, en gras, dilatation,
parangonnage, etc.
I.
Les classifications sont-elles
une aide au choix d’un caractère ?
À
Typographie, du 12 au 20 mars 1998.
T.
BOUCHE :
J’ai eu récemment une remarque de John Hudson (Tiro Typeworks)
sur Comp.Fonts qui disait en substance : « La
classification à utiliser dépend du contexte. »
En
gros, je suis d’accord avec ce que tu dis sur l’emploi des
classifications par les « praticiens »… Reste que le
recours à plusieurs classifications s’explique avant tout par le
fait qu’aucune n’est pleinement satisfaisante…
T.
BOUCHE :
À quoi servent les classifications ? À quoi bon vouloir
ranger tout caractère dans une case ? À mon sens, ce qui
sert, c’est de limiter les recherches quand, à un moment
donné, on a besoin de trouver un caractère pour un besoin
donné. Disons que si j’utilise du Granjon, et que j’aie besoin
tout à coup d’un gras italique, je vais aller voir du côté des
garaldes s’il n’y a rien d’approchant, non ? Si au
contraire je cherche une linéale minimisant le contraste avec
Granjon, j’aurai besoin d’une information sur la structure et
les proportions, que ne me donne pas Vox. […]
Si
on limite la portée des classifications à leur utilité (qui
est toujours relative), méritent-elles un procès ? Enfin,
je pense que la classification Vox-AtypI a un intérêt
pédagogique : c’est souvent grâce à elle que les
néophytes découvrent les moyens de distinguer différents
caractères. Dans cette optique, je suis d’accord : une
classification mieux faite et moins facilement mise en brèche
serait peut-être utile. […]
Tu
n’as donc jamais connu ça ? Tourner autour d’un texte qui
te parvient nu comme un ver, mal dactylographié, truffé de
bourdes et recelant quelques perles que — comme un sculpteur —
tu fais peu à peu ressortir, tu amènes silencieusement à la
lumière. […] J’ai intensivement utilisé Didot pour des travaux
difficiles parce que ça force à une lecture plus lente. Et
j’aimerais que Maldoror me salisse les mains. Je
serais prêt à souscrire à ton axiome : « L’impact de
la typo sur un texte est inversement proportionnel à la
qualité dudit », mais le confort, le je-ne-sais-quoi, le
zen en un mot ? Allons, en toute
honnêteté ! ?
En
toute honnêteté (c’est difficile : c’est pas dans mes
habitudes…), tu as raison… Enfin… je veux dire que je ne suis
pas loin de penser la même chose que toi…
Je
ne suis pas puritain au point de croire qu’une bonne et une
mauvaise typo c’est kif-kif… Comme tout le monde ici, je suis
persuadé que la typographie peut « infléchir la
lecture ». Ce que je conteste, c’est l’importance accordée
au choix du caractère, singulièrement dans la composition des
textes littéraires (il va sans dire que j’exclus d’office les
pitreries ou les contresens caricaturaux…). Je crois sincèrement
que c’est une foutaise d’affirmer (comme cela se fait parfois)
que, si un vrai didot se marie idéalement avec du Chénier, une
tranche de Leopardi exige du vrai bodoni…
Je
crois encore plus sincèrement qu’une bonne police de labeur,
qu’elle soit garalde, réale ou didone, peut composer sans grave
dommage tous les chefs-d’œuvre écrits par nos semblables dans
les siècles des siècles… Pour autant, rien n’interdit
d’effectuer des choix subtils qui rehausseront l’éclat de tel ou
tel texte !
Quant
à mon axiome… il se vérifie dans les faits : aujourd’hui
comme naguère, les secteurs qui sollicitent le plus la diversité
des caractères sont ceux qui diffusent les textes par nature les
plus creux. Ce n’est pas un hasard si la luxuriance débridée se
manifestait dans les travaux de ville, les bilboquets
(aujourd’hui, à chacun de nommer ces secteurs, je ne veux me
fâcher avec personne…).
À
Typographie, du 25 juillet au 2 août 1998.
C.
LEDUC :
J’ai toujours voulu accorder le plus grand soin au choix des
typographies, en regard du sens même du travail des différents
écrivains. Il resterait à définir, bien entendu, le
« sens » d’une famille typographique…
Puisque
l’on en parle, tentez le coup avec les cinq orientations et les
huit connotations de Blanchard…
A.
HURTIG :
En dépit de certaines réticences [sur la classification Vox],
elle me semble la seule encore utilisable, car elle fait à la
fois référence à la forme, à l’histoire et à la connotation.
C’est
précisément ce qui la rend inutilisable…
A.
HURTIG :
Ce qui fait que la notion de « familles » de
caractères est très utile (un outil pratique de tous les jours
dans l’ordre du choix de telle police pour tel travail) mais
ne peut prétendre à aucun critère scientifique ou rigoureux,
dès la fin du XIXe
siècle.
Hihi…
aucun critère rigoureux… C’est moche pour une classification…
A.
HURTIG :
Une simple remarque : autrefois, les métiers étaient
séparés, les typos ici (qui se servaient du plomb), les
affichistes là (qui utilisaient le pinceau).
Dans
l’édition, ils le sont encore. C’est le rapport de force (texte
à lire/texte à voir, typo/graphie (hihi), compo/mise en pages,
etc., bref « texte »/« image ») qui a
évolué. C’est normal, triste mais normal : la culture
typographique se transmet dans des écoles d’arts
« graphiques »… elle est ignorée dans les disciplines
dites « littéraires ». C’est là où ça déconne, car,
contrairement à ce que croient les typo-graphes (hihi), la
typographie n’est pas destinée prioritairement à engendrer des
images.
Dans
la grande galerie des ancêtres typographes, tu as beaucoup de
grammairiens, d’éditeurs, d’écrivains… Aujourd’hui, tu as
surtout des graphistes, des informaticiens et quelques
sémiologues… Je ne dis pas que les seconds sont moins estimables
que les premiers (ce serait con : cela fait plus d’un quart
de siècle que j’ai été estampillé « communicateur
visuel » (n’importe quoi…) en sortant des Arts déco…), je
dis que cet état de fait n’est pas sans conséquence.
Dans
mon boulot, il est rare que j’aie à choisir les polices, les
corps, les justifs… D’autres sont payés pour le faire, tant
mieux, car cela ne me passionne pas, mais faut pas qu’ils
s’avisent de me dire où l’on doit mettre des caps ou de l’ital…
Ils ne le font d’ailleurs pas. Ça existe encore, la division du
travail… Pourvu que ça dure.
A.
HURTIG :
La logique de lecture était considérée comme différente,
l’histoire et les traditions n’étaient pas les mêmes, au point
que les familles de caractères ne se superposaient pas d’un
métier à l’autre. Tout cela est désormais balayé, en
particulier parce que nous utilisons tous un seul outil :
l’ordinateur. Et qu’on trouve des tas de polices dont rien ne
nous dit à quoi elles sont a priori destinées.
Oui…
et c’est pourquoi il serait bon de revenir, non aux
classifications d’avant Thibaudeau, mais à leur principe :
la destination. Polices de labeur, c’est un peu court
évidemment, mais c’est loin d’être idiot…
Quant
aux « fantaisies »… Pourquoi veux-tu que l’on perde
son temps à « classer » finement des polices dont on
n’a pas, dont on n’aura jamais l’usage ?
A.
HURTIG :
Mais on aimerait quand même que les choix typos soient un peu
mieux adaptés aux collections, parce que la tendance au
n’importe quoi se répand…
Mais
moi aussi j’aimerais mieux ça !…
A.
HURTIG :
C’est non seulement nécessaire, mais même indispensable pour
tous les autres travaux : on adapte la couleur du gris
typo (et le reste de la typo, en fait) au sens (dans
tous les sens du mot « sens » : esthétique,
sujets, etc.) du travail de l’écrivain. L’ensemble de la
typographie vient servir l’œuvre, au lieu de la combattre.
Certes…
tu peux tenter d’adapter la typo au « sens » de
l’œuvre… mais, si j’ai bien lu Caroline Leduc, il était question
d’accorder le « sens » de l’œuvre et le
« sens » de la typo… Alors là, bonne chance !…
C.
LEDUC :
Ne pas reconnaître que les familles typographiques ont des
propriétés évocatives, sensuelles ou intellectuelles propres
serait les imaginer neutres.
Personne
ne se risque à imaginer une telle neutralité. Toutefois… la
plupart des propriétés en question sont plus liées à
l’observateur qu’à l’objet observé (elles seraient donc plus
pertinentes dans une classification des lecteurs…).
Par
exemple, le fait que les mécanes « évoquent » chez
certains la lourdeur et chez d’autres l’essor de la presse au XIXe siècle,
que les anglaises évoquent la gravure sur cuivre ou le menu du
dernier week-end gastronomique, nous en apprend plus sur nos
interlocuteurs que sur ces caractères. […]
C.
LEDUC :
Si je me souviens bien, les caractères de Firmin Didot
retouchés par Vibert se développent après la Révolution.
L’ennui,
c’est que les didones sont « nées » avant… L’ennui,
c’est qu’elles ont eu du succès longtemps après, y compris sous
la Restauration… (et y compris chez vous, si je vous ai bien
lue…).
C.
LEDUC :
La haine des révolutionnaires pour le lyrisme et
l’individualisme baroque n’est-elle pas clairement lisible
dans cette famille ?
En
supposant que cette « haine » soit avérée,
devrons-nous expliquer aux premiers éditeurs de Vigny ou du
jeune Hugo qu’ils se sont plantés en privilégiant des caractères
dont le « sens » était si peu en accord avec celui des
œuvres composées ?
C.
LEDUC :
La question, effectivement, serait de savoir si, en dehors des
caractères historiques et de leur genèse, on pourrait dégager
des propriétés inhérentes aux typographies… Difficile, dans ce
cas, de ne pas avoir recours aux méthodes des analystes de
l’image ou des sémioticiens…
Mais
non, c’est très facile… et c’est précisément parce qu’il a trop
recouru à ces méthodes que Blanchard a partiellement échoué dans
sa tentative…
Par
ailleurs, qu’est-ce qu’un caractère
« historique » ? Selon le sens, nous n’en
employons aucun… ou… tous ceux que nous employons le sont.
I.
LÉVY :
Il me semble que la typographie, comme beaucoup d’autres
choses, est un objet culturel et social. La
typographie s’inscrit dans le temps (merci Môssieur de La
Palice), elle s’inscrit dans une mutation technique (pas
uniquement la sienne mais celle des médias en général). La
typographie est datée visuellement.
Ici,
quelques milliards de fois d’accord.
I.
LÉVY :
Imaginez-vous les livres de Thibaudeau composés en
Mistral ? (Ou même en Garamond ?)
Certes
non. Auriol et les anciens du Chat noir ne s’en
remettraient pas.
I.
LÉVY :
Imaginez-vous le Trocadéro autrement qu’en Peignot ?
Certes
oui… puisqu’il a été détruit pour ça…
Mais
quittons les exemples extrêmes (je crois qu’aucune réédition du
palais de Chaillot ne figure dans les prochains offices)…
J’imagine parfaitement la plupart des œuvres littéraires que
j’aime dans des typos très différentes. Je n’ai d’ailleurs aucun
mal à les imaginer : il suffit que je me retourne et que je
tende la main vers ma bibliothèque.
T.
BOUCHE :
Pour moi, la classification Vox a joué un rôle indéniable
d’apprentissage, à un moment donné de l’histoire de la typo,
des traits distinctifs des caractères. Maintenant, que lui
demanderais-je ?
À
la façon d’une classification mycologique, la possibilité de
déterminer de façon exacte la police employée sur un
échantillon. Pour ce faire, il est probable que la Vox n’est pas
suffisamment scientifique (le nombre de polices qui changent de
classe selon les auteurs est tout de même faramineux !
Times, Caslon sont parfois réales ou garaldes, Minion peut
objectivement être classée humane, réale ou garalde, selon le
critère choisi). Peut-être la solution pour cela est
Alessandrini : suivre une succession de critères
discriminatoires.
« À
la façon d’une classification mycologique » : je saute
sur l’occasion… Il y a longtemps que je pense à cette
comparaison (mais je craignais jusqu’alors les foudres de
Jacques Melot et du comte de Champignac…).
Pour
l’utilisateur (le consommateur…), la classification savante est
certes intéressante… mais ce n’est pas une aide au choix… Ce qui
compte pour lui, c’est de pouvoir choisir les machins délicieux,
voire simplement comestibles, d’éliminer les espèces sans
intérêt et surtout les saloperies vénéneuses.
Or,
d’un point de vue gustatif, ce qu’il y a de pratique avec la
myco et la typo, c’est que les médiocrités et les saloperies
grouillent alors que les truffes et les morilles sont rares. Le
tri est vite fait. Sauf si l’on a des ambitions taxinomiques,
pourquoi se faire caguer à classer le rebut…
Je
plaisante. Il est évident qu’une classification réellement
savante serait une bien belle chose. Cela dit, même fondée sur
des critères exclusivement formels et débarrassée de toutes les
foutaises pseudo-historiques (une Thibaudeau
perfectionnée !), elle ne nous aiderait pas davantage à
« choisir ».
À
Typographie, le 17 avril 2001.
A.
HURTIG :
Je cite de mémoire une classification vue sur le disque dur
d’une graphiste dans je ne sais plus quelle entreprise de
communication :
Par
dossiers :
—
typos marrantes ;
—
typos genre ordinateur ;
—
typos bizarres (j’y ai trouvé le Didot… sans doute égaré
là) ;
—
typos bâtons ;
—
typos à patins (comprendre : à empattement)
—
typos à vérifier (ce dossier étant vide) ;
—
typos à jeter car trop pourries.
Que
penses-tu de celle-ci ?
1.
Bons caractères de labeur (rares, donc faciles à
« ranger »…).
2.
Bons caractères de fantaisie.
3.
À jeter.
II.
Classification Thibaudeau
et classification Vox
À
Typographie, le 27 juillet 1998.
A.
HURTIG :
Qu’est-ce qui serait, pour toi, une classification utilisable
(un outil d’aide au choix d’une police de caractères pour un
travail donné tout autant qu’un guide pour la compréhension de
la « matière » typographique en elle-même) ?
Justement !
C’est pas la même chose ! […]
Une
classification rigoureuse (sans cocktail hasardeux de critères),
une aide au choix et un guide pour bien comprendre de quoi qu’on
cause… faut être optimiste pour croire que ça se combine
harmonieusement. Je crois qu’en manipulant hardiment diachronie
et synchronie on perd son temps et qu’en confondant taxinomie et
éthologie on n’aide personne à y voir clair dans la jungle
typographique…
Toute
comparaison est déraisonnable… mais enfin… tu peux classer les
mots comme tu veux (alphabétiquement, étymologiquement, par
classes, etc.), ça ne te fournira jamais un manuel de
stylistique…
J.
FONTAINE :
1921 : Francis Thibaudeau, 1952 : Maximilien Vox,
1952 : Tschichold, 1953 : Berry-Johnson, 1954 :
Balding-Mansel, 1954 : Bastien, 1955 : John C-Tarr,
1957 : Aldo Novarese, 1960 : Pelliteri, 1962 :
Atypi, 1964 : DIN 16518, 1964 : Aldo Novarese,
1978 : Marcel Jacno, 1979 : Jean Alessandrini,
1986 : Adobe, 1987 : Bitstream…
Bon…
je pense qu’il est grand temps de classer ces classifications… À
ce rythme… dans quelques années… on ne s’y retrouvera plus…
Blague
à part, il n’est pas encore né le Linné typographe.
La
question pourrait être : est-il concevable ?
À
Typographie, le 17 avril 2001.
T.
BOUCHE :
Lacroux ne m’a pas convaincu que la version détaillée de
Thibaudeau soit la solution…
Solution
à quoi ?… Au « rangement » aisé des
« collections » de caractères ? Non…
Au
bordel conceptuel ? Oui… par le retour à un minimum de
raison, à une classification « modeste », fondée sur
les seuls critères morphologiques, sans interférence
d’approximations esthéticohistoriques, sans ambition théorique
déplacée, non maîtrisée…
À
Typographie, le 23 janvier 2002.
A.
HURTIG :
J’avais oublié le « détail » de Vox omettant à la
fois les frakturs et les écritures métèques (surtout juives…).
Le refoulement de Vox fonctionnait quand même assez bien.
Tu
connais les sentiments que m’inspire Mr Vox.
Pourtant, je crois que l’ajout ATypIque de la classe des
écritures « étrangères » (ou pire : non latines…)
est une foutaise qui n’est pas moins (idéologiquement et
taxinomiquement…) pourrie que son oubli…
[La
classification Vox] repose sur la volontaire confusion de
critères morphologiques et historiques, bref, elle repose sur
une bouillie conceptuelle…
III.
L’exemple des manuaires
À
Typographie, le 11 mars 1998.
Hep !
Taxinomistes !
Une
question me chiffonne depuis longtemps. Celle des manuaires…
Alors je vous en pose trois (pour commencer…) :
1.
Comment définissez-vous cette classe ?
2.
Pensez-vous que la définition puisse être la même dans la
classification Vox (avec les fractures) et dans la
classification Vox-Atypi (sans les fractures) ?
3.
Selon vous, quelles sont les (principales…) polices admises dans
le club ?
3
bis. Si je respecte les conclusions des savants voxolursiens, je
me retrouve avec des carolines et des excoffoneries. Est-ce
normal, docteur ?
J.
ANDRÉ :
Ce bon vieux (de bon vieux de) Baudin écrit dans sa Typographie
au tableau noir : « Toute manuaire, avec ou sans
empattements, quelle que soit la graisse, reproduit le rythme
d’une écriture à main posée. Avant Gutenberg, toutes les
écritures dites livresques : onciales, carolines,
gothiques, etc. ne pouvaient être que “manuaires” &
nécessairement, plus ou moins personnalisées ; elles
étaient cependant standardisées dans toute la mesure du
possible, en vue de la lecture continue. À présent, elles sont
plus que jamais personnalisées, mais moins que jamais
livresques. Conçues en dehors de toute idée de lecture
continue, elles sont, comme les scriptes, plus souvent tracées
à l’imitation de la brosse que de la plume & utilisées
pour les titrages & dans la publicité. »
Baudin
continue son chapitre sur les manuaires par : « Les
caractères gothiques ont normalement (il y a toujours des
exceptions) plus de “graisse” que les caractères romains ou
italiques. Ils sont d’un tracé plus régulier, d’un rythme plus
uniforme. Il n’y a pas de capitales. Il n’y a que des
initiales avec lesquelles on ne pourrait jamais composer un
mot lisible. Textur, Fraktur, Rund Yiddish, Schwabacher
enrichissent la palette allemande. »
Dr
Baudin donne comme exemples : « Banco (Excoffon,
1951), Codex (Trump, 1953), Contact (Reiner, 1955), Flash
(Crous-Vidal, 1952), Dom Casual (Peter Dom, 1955), Ritmo
(Novarèse, 1955), Studio (Overbeek, 1946), Lasso (Kaufman,
1939), Jacno (Jacno, 1954), Libra (De Roos, 1938), Mercurius
(Reiner, 1957), Paris (Crous-Vidal, 1952), Riccardo (Gerbig,
1928), Psitt (Ponot, 1954). »
Ce
bouquin date de 1982 : on n’a rien dessiné en manuaire
depuis 1957 ?
Merci
pour la diligence de la réponse ! Ce qu’écrit Baudin est
indiscutable, mais ne résout pas vraiment le problème de fond…
puisque son texte est essentiellement consacré à sa
description : le gouffre qui sépare, par exemple, Libra et
Banco…
J.
ANDRÉ :
À noter que Gerrit Noordzij a proposé une nouvelle
classification (utilisée dès 1990 par la fonderie Mannesman
Scangraphic) où les manuaires sont absentes (ou plutôt
ventilées dans les caractères à fractures et scriptes si je ne
m’abuse).
Ah !
enfin une mesure intelligente ! Ça, au moins, ça résout le
problème ! « Problème » qui devrait se poser
surtout à ceux qui accordent du crédit à la classification
Vox-Atypi…
T.
BOUCHE :
Je me demandais si les fontes de Frutiger, comme, et en vrac,
Herculanum, Ondine, Pompeijana, Rusticana ou Vectora rentrent
là-dedans.
Si
manuaire = à main posée et scripte = à main levée, Jenson est
une manuaire, non ?
Bien
vu… et perceptible dans la représentation circulaire (la seule
digne d’intérêt *) de la classification Vox, où les
manuaires sont coincées entre les scriptes et les humanes…
*
Car elle met en évidence les inévitables contradictions
engendrées par la dualité des critères (historiques &
formels) tout en autorisant les franchissements de frontière
qui, dans certains cas, les résolvent (en foutant le bordel ou,
plus drôle, en réduisant à néant les fondements de la
classification…).
Pour
revenir aux définitions voxatypiques… le lien entre la brosse
(moderne) et les manuaires est une illusion dans le cadre d’une
définition « historico-formelle » (!!!) des manuaires,
même en assimilant bec biseauté et brosse… La taille du bec
(biseau/pointe) ne permet pas de retrouver ses petits dans le
couple manuaire/scripte. Quantité de scriptes sont issues de
becs biseautés, comme les manuaires.
D’où
l’intérêt des classifications uniquement formelles, comme celle
de Thibaudeau…
Le
seul travail utile aurait été de l’affiner, de la compléter,
modestement, patiemment. Au lieu de ça, on s’est embarqué dans
la discrimination, selon des critères douteux…
IV.
Connotation, dénotation et histoire de la typographie
À
Typographie, du 1er au 4 août 1998.
J.
FONTAINE :
Ça aussi, c’est une question intéressante. Authenticité et
respect des conditions d’origine versus liberté
d’exécution et d’expérimentation.
Oui,
c’est intéressant, mais je ne suis pas sûr que la comparaison
avec la musique soit très parlante […]. Les textes ne sont pas
des partitions. La typographie n’est pas un instrument, encore
moins une interprétation. Je crois que nous serons d’accord sur
ce point. Ce qui suit n’est donc pas une « réponse » à
votre message ou à celui de Thierry (bravo pour Artaud en humane
littérale ! c’est sûrement plus « adapté » qu’un
caractère typiquement années trente, Art déco maybe !) mais
la suite de mon radotage… Il est vrai que je reprends un de vos
termes (authenticité), car il me semble recouvrir partiellement
les fameuses « connotations historiques ».
Je
ne nie évidemment pas que les caractères ont une histoire… et
que l’on peut dater leur apparition, suivre leur évolution,
leurs périodes d’expansion, de récession, de renaissance, leurs
combinaisons, leur filiation, etc. Ce que je nie, c’est…
Primo,
que tous les caractères soient égaux devant l’Histoire et ses
pesanteurs… Certains demeurent empêtrés dans leur temps et
« connotent » un max et même à mort (lisez Blanchard,
il aborde la question… d’une manière hélas très réductrice, car
ses mauvaises lectures l’ont poussé à privilégier la
« mode »…), d’autres se sont libérés, ont vécu
longtemps et ont eu beaucoup d’enfants. Dans leurs avatars
d’aujourd’hui, ils ne connotent plus rien
d’« historique ». Dire qu’un New Baskerville connote
le XVIIIe finissant
revient à dire que la Madeleine connote la Grèce antique, que le
Parlement of London connote le Moyen Âge, que gothique et
néogothique c’est du kif.
Deuzio
et a contrario, dire, par exemple, que l’Auriol connote ou
évoque l’Art nouveau n’a aucun sens puisque c’est une
des manifestations typographiques de l’Art nouveau. C’est à peu
près aussi fin que de dire que les « mobiliers
urbains » (!) de Guimard « connotent l’Art
nouveau »… Si (hypothèse hardie) l’Auriol était devenu un
caractère de labeur et avait eu des rejetons dans la carrière,
ce serait another song.
Troizio
et enconséquenzo, toute classification mêlant au petit bonheur
les critères formels et historiques n’a aucun intérêt…
Quatro
et finalmento, revenons à la destination… Qu’est-ce qu’on
compose ?
Parlons
d’abord des textes destinés à être lus, donc des caractères de
labeur. Éliminons Platon, Pouchkine et tous les empêcheurs de
choisir sereinement des caractères « historiquement
adaptés ». Prenons les œuvres littéraires françaises de
1630 à 1830. L’essentiel est là, disponible… presque comme au
premier jour. Suffit de pousser la porte des grandes
bibliothèques.
De
toutes les rééditions (éliminons les éditions savantes, qui
posent des problèmes d’« authenticité » très
particuliers…), les plus comiques sont celles qui s’imaginent
restituer une parcelle d’authenticité en adoptant un
« caractère d’époque » (si on parlait meuble, on
dirait plutôt de « style », car il n’y a plus de
véritables caractères d’« époque »… en usage…).
Même
en respectant scrupuleusement les graphies, les marges,
l’empagement d’origine, c’est du pipeau. […] Car, si
l’authenticité c’est la tronche d’un caractère, pourquoi ne
résiderait-elle pas aussi dans les alignements défectueux, dans
le pur chiffon du papier, dans le délicat foulage de la
véritable typographie d’antan ? À quoi ça rime de faire
croire qu’un clone approximatif quoique électronique du Jenson
imprimé en offset sur du couché pure pâte chimique vous a un
charme « authentique » ? Je pense sincèrement que
ce genre d’authenticité est du même tonneau que celle du
faubourg Saint-Antoine… (Pour les non-Parisiens : on y vend
du meuble de « style » rectifié cosy bourge.)
Tout
bon caractère de labeur est bon à tout labeur. Composer
Montaigne en réale ou en didone n’est pas un anachronisme, c’est
un choix (éventuellement) motivé par des raisons qui n’ont rien
d’étroitement historiques.
Bis :
C’est pourquoi la classification Vox ne peut pas être une
« aide au choix ».
La
plupart des tentatives typo-graphico-connotatives portant sur
des bribes (mots isolés, phrases…) jouent soit sur la redondance
molle soit sur l’opposition grossière, c’est-à-dire sur des
niaiseries. Étendre le champ d’expérience est à mon sens une
drôle d’idée.
Quittons
le labeur pur et dur, revenons en ville et dans ses feuilles. La
floraison des caractères à fortes « connotations »
anecdotiques est surtout perceptible dans les travaux de ville,
les dépliants, l’affiche, les jaquettes, la presse spécialisée,
certains « beaux livres », l’emballage, les
gifouèbiques, etc. Cela doit bien dénoter quelque chose…
Chez
les typo-graph(ist)es, on parle beaucoup de connotations. C’est
légitime, mais faudrait quand même pas oublier que par
définition c’est secondaire…
O.
RANDIER :
Pourquoi vouloir toujours que les choses s’excluent
mutuellement ?
Moi,
je ne veux rien de tel. C’est vous (j’entends ton parti dans ce
débat) qui jouez (sans le formuler explicitement) sur une
confusion volontaire entre fond/forme et texte/typo… Je ne vous
suis pas. Dans un texte la « forme » ne
concerne pas que la « mise en forme typographique ».
En outre, dans cette discussion, nous employons tous
consciemment le terme « typographie » dans une
acception plus ou moins étroite selon les nécessités de nos
argumentations respectives. C’est pratique mais ça ne nous
mènera pas loin car nous tournons en rond.
Tout
un pan de la typo est évidemment indissociable du texte (j’en
sais quelque chose) mais est peu affecté par le choix
(intelligent) de la police. Dans ce fil, il me semble que nous
avons surtout parlé du choix de la police (et de la mise en
pages) et de son éventuelle adéquation au « sens » du
texte… (Un auteur souvent évoqué ici rameute même les
correspondances du bon docteur Baudelaire, qui n’en peut mais…)
Ne fais pas comme si j’avais dit que n’importe quelle police
convient à n’importe quel texte… Je dis justement le contraire…
puisque j’insiste sur la destination… en clair : sur les
qualités proprement typographiques des polices…
Je
n’ai jamais dit que Montaigne pouvait être composé en Serpentine
ou en Busorama… J’ai simplement dit qu’une (bonne) réale ou une
(bonne) didone conviennent parfaitement. Reste alors, et là je
suis évidemment d’accord avec vous, à faire son travail…
c’est-à-dire à définir un empagement, à régler finement les
paramètres (espacement, interlignage, etc.) selon la
police, la graisse, le corps choisis et, dans certains cas,
selon les « particularités physiques » du texte. Quant
au « sens »… s’il a besoin de nous et de nos potions…
c’est qu’il est bien chétif…
Tu
me dis : « L’ennui naquit un jour de
l’uniformité. »
Certes…
mais la conception que je défends n’exclut pas l’invention,
l’audace typographique. Au contraire ! elle lui restitue de
l’autonomie… C’est la conception de ceux qui pensent qu’à un
texte donné pourrait correspondre une typo idéalement adaptée
qui conduit théoriquement ce malheureux texte à l’uniformité…
O.
RANDIER :
Cette insistance à vouloir le texte, rien que le texte, a un
côté puritain que je trouve suspect. Le texte existe-t-il sans
les caractères qui servent à le composer ?
Ça
dépend de l’acception retenue… La littérature orale
n’aurait-elle point de textes ? Un texte déclamé reste un
texte. Les anecdotes de la composition typographique auront peu
d’influence sur l’interprétation : ce qui jouera à plein
appartient à d’autres traditions.
En
revanche… des formes littéraires fixes ont engendré des mises en
forme typographiques plus ou moins fixes.
À
Typographie, le 8 octobre 1999.
O.
RANDIER :
Auriol […] Ami de Th.-A. Steinlein et de H. de
Toulouse-Lautrec.
Saperlotte !
Manque le principal : Alphonse Allais !
O.
RANDIER :
Polices : l’Auriol (1901-1904), la Française, le
Champlevé, le Clair-de-lune, le Robur.
Française
« légère » ou « allongée »… Tout un
programme. Son Champlevé est un Auriol éclairé. Son
Clair-de-lune est un Robur éclairé.
O.
RANDIER :
L’Auriol, par son tracé particulier évoquant le pinceau, avait
droit à une catégorie à lui tout seul dans la classification
Thibaudeau.
Pas
exactement. C’est comme si tu disais que le Didot a droit à sa
catégorie à lui tout seul… Pour Thibaudeau, l’auriol désigne
génériquement les elzévirs dont les empattements sont
« tracés au pinceau ». Ils sont rares, évidemment… et
le plus bel auriol, c’est l’Auriol… Attribuant à certains ordres
(ou classes…) des noms d’espèces, la nomenclature n’est pas le
point fort de la classification Thibaudeau (qui reste cependant
la plus intelligente des bases taxinomiques !).
Le
club de l’Entresol, le club des Jacobins, le club Jean-Moulin.
L’Automobile
Club de France, le Jockey Club.
Petiot
1982 {Jockey-Club}.
Code Titre d’œuvre.
« Les
lois sont des toiles d’araignée à travers lesquelles
passent les grosses mouches et où restent les petites. »
Honoré de BALZAC,
la Maison Nucingen.
Recueils
de lois
Comme
ceux des livres sacrés des religions monothéistes, les titres
des codes et des recueils similaires se composent en
romain : la soixante-cinquième édition du Code civil.
Attention !
Ce privilège n’est accordé qu’aux véritables titres des
véritables recueils de lois : la seizième édition du Code
typographique.
•••
Les titres ne s’abrègent que dans les notes et les références.
C. civ. | Code civil |
C. com. | Code de commerce |
C. for. | Code forestier |
C. instr. crim. | Code d’instruction criminelle |
C. just. milit. | Code de justice militaire |
C. Nap. | Code Napoléon |
C. pénal | Code pénal |
C. proc. civ. | Code de procédure civile |
C. proc. crim. | Code de procédure criminelle |
C. trav. | Code du travail |
Officielle, l’abréviation « C. civ. » est
néanmoins déplorable (voir : Abréviation
§ 3.2.4). « C. pénal » est en revanche
irréprochable…
Code
postal
Adresse
Filet
séparant les colonnes de composition.
Colonne
Monument
Colophon Achevé d’imprimer.
Note
finale d’un livre, reproduisant ou commentant le titre.
Il
indique éventuellement le type de machine, la qualité du papier,
la police et le corps employés, le nom de l’éditeur, du relieur
ou du brocheur, du compositeur, du photograveur…
Il
figure en principe sur la dernière page imprimée *,
composition centrée, mais cette convention n’est pas toujours
respectée (recto de la page de titre). Le style va de la belle
formule sèche au générique à la Sacha Guitry.
*
Pour mériter le nom de colophon, il ne doit pas se contenter de
décrire diverses caractéristiques du livre ; il doit être
son « achèvement » dans la pagination.
Combat
Guerre
La
Commission centrale d’aide sociale, la Commission nationale des
dommages de guerre, la Commission nationale technique.
La
commission départementale d’aide sociale, la commission des
finances, la commission Langevin-Wallon, la commission de
première instance du contentieux général de la Sécurité sociale,
la commission régionale des dommages de guerre.
L’abréviation
Cie ne s’emploie qu’en fin de dénomination
propre : Montchicourt & Cie.
Typogr.
romand 1993.
La
Compagnie générale des eaux, la Compagnie générale
transatlantique, la Compagnie de Jésus, la Compagnie du
Saint-Sacrement.
Tout
assemblage de lettres, de chiffres, de signes, destiné à être
reproduit sur un support (papier, écran, béton, etc.).
Lefevre
1883 : « La composition, proprement dite,
est l’assemblage des lettres, pour en former des mots, des
lignes, des pages, de quelque nature qu’ils soient. »
À
Typographie, le 7 février 2002.
J.
ANDRÉ :
En composition froide (mais ce terme est récent) les
caractères sont moulés (avec du plomb chaud) puis refroidis et
utilisés des heures, des mois, voire des années ou siècles
plus tard. Avec Linotype, Monotype, etc., le plomb chaud est
coulé dans une matrice au moment de la composition. Le
linotypiste avait à un mètre de lui un petit chaudron où le
plomb chauffait.
C’est
la première fois que j’entends parler d’une telle distinction.
Ta composition froide, c’est la composition manuelle. Ta
composition chaude, c’est la composition mécanique.
Pour
tout le monde ou presque, la composition chaude — qu’elle soit
manuelle ou mécanique —, c’est le plomb… La composition froide,
c’est la photocomposition, puis la composition électroNique-T.M.
Confédération
Pays
Conférence
Accord, conférence,
traité
Conflit
Guerre
Minuscule
initiale dans la plupart des cas : le congrès de
Vienne, le XXIIe congrès du Parti communiste
français.
Majuscule
initiale lorsque le mot est employé absolument : le
Congrès s’amuse, ou lorsqu’il désigne : la réunion du Sénat
et de l’Assemblée nationale (France), l’assemblée constituante
de 1830 (Belgique), le parlement, composé du Sénat et de la
Chambre des représentants (États-Unis).
Le Conseil des Anciens,
le Conseil des Cinq-Cents, le Conseil constitutionnel, le
Conseil économique et social, le Conseil d’État, le Conseil de
l’Europe, le Conseil des ministres (
le Monde
écrit [conseil des ministres]), le Conseil des prises, le
Conseil de sécurité (de l’O.N.U.), le Conseil supérieur de la
langue française, le Conseil supérieur de la magistrature.
Un
conseil d’administration, le conseil des prud’hommes, le conseil
de révision.
Le
conseil général du Morbihan, le conseil municipal de Vannes.
Constellation
Astre
Convention Accord, conférence, traité, Alliance, Pacte.
Minuscule :
la convention de Berne, la convention de La Haye.
Majuscule :
la Convention (1792-1795), la Convention des institutions
républicaines, la Convention démocrate, la Convention
républicaine (États-Unis).
Impr.
nat. 1990.
Berthelot
1992.
« On
appelle copie, par une singulière altération du
véritable sens de ce mot, par une sorte d’antiphrase,
l’original, soit imprimé, soit manuscrit, qui sert de
modèle pour la composition. Du reste, ce mot de
vieille date nous fait connaître que l’imprimerie
recevait jadis des manuscrits mis au net. »
Henri FOURNIER,
Traité de la typographie.
Tout
document, manuscrit ou imprimé, que le compositeur doit
reproduire. L’informatique a considérablement modifié la notion
même de copie. Dans les configurations les plus rustiques, une
part importante de la composition (saisie) est effectuée par
l’auteur. S’il dispose d’un traitement de texte perfectionné ou
d’un logiciel de publication assistée par ordinateur, un
auteur-compositeur-maquettiste intrépide peut assumer seul
toutes les tâches de composition et de mise en pages. Dans la
plupart des cas, une « disquette d’auteur » est
néanmoins assimilable à une copie, car dans un cadre
professionnel il est encore rare que de tels fichiers soient
livrés aux presses sans l’intervention préalable de tiers.
Quels
que soient ses compétences et ses talents (littéraires,
syntaxiques, orthographiques, typographiques, graphiques, etc.),
un scripteur est incapable de maîtriser la mise au point
orthotypographique de son œuvre : seul un tiers à l’œil
féroce peut tenter d’approcher l’inaccessible perfection.
Les
tiers (éditeurs, correcteurs, maquettistes, etc.) se garderont
de modifier si peu que ce soit une disquette d’auteur. Les
corrections sont effectuées de préférence sur des sorties-papier
(assimilables à des pré-épreuves) et saisies sur une
« copie de la copie ».
Coquille Bourdon, Correction, Mastic.
Faute
typographique résultant de la substitution d’une lettre à une
autre : le sémiologue étudie la vie des sigues.
(En composition chaude, coquille désignait aussi une lettre mal
placée dans la casse lors de la distribution.) Très perverses
sont les coquilles qui engendrent un autre mot : le
sémiologue étudie la vie des sigles.
Des
substitutions multiples peuvent produire une anagramme : le
sémiologue étudie la vie des singes.
Frey
1857.
Quelques
grands classiques : selon le ministre des cuites,
le roi n’est pas à bout de ses farces
et pourra bientôt se laver ;
l’auteur est de la famille des buses.
On
considère parfois que toutes les fautes imprimées qui altèrent
le mot ou la phrase sont des coquilles. C’est une extension de
sens très abusive. Toutes les fautes typographiques ne sont pas
de même nature, voir : Bourdon,
Doublon. Ensuite,
et c’est là l’essentiel, toutes les fautes imprimées ne sont pas
nécessairement d’ordre typographique : la plupart sont des
fautes d’orthographe, expression déplaisante qu’il est habile
d’éliminer. La « coquille généralisée » a ceci de
charmant qu’étant accidentelle, elle ne trahit pas un défaut de
compétence mais d’attention.
Intentionnelles, certaines graphies ne sont pas des
coquilles : Sa Majesté la ruine d’Angleterre. Sur les
manuscrits, les auteurs ont intérêt à indiquer clairement que de
telles graphies ne devront pas être corrigées.
On
appelle également coquilles les substitutions de chiffres. Elles
sont le plus souvent très difficiles à débusquer… : en
1926, ce sinologue a étudié les 215
clés du chinois.
Une
coquille de « compose tel » ?
À
F.L.L.F., le 5 mai 2000.
C’est
une affaire mystérieuse. Toutefois, on a bien le droit de
privilégier une hypothèse fumeuse parmi d’autres. Comme j’aime
bien les astuces navrantes, je n’ai rien contre un lien non
pilgrimesque avec Compostelle, sur le modèle du célèbre
« aller en Germanie » (allez, faut qu’j’remanie) :
Merde ! une coquille, faut qu’je compose tel… Pénible… (Dans
le jargon typo, « composer tel » signifie
« composer en respectant strictement la copie ».) […]
Selon
plusieurs auteurs, la fête (corporative) de la coquille est
célébrée dès le XVe
siècle (!) chez les imprimeurs lyonnais. Émile Leclercq fait
observer que les caractères étaient coulés dans des moules dits
« à la coquille » et que les lettres rebutées
retournaient à la fonte, c’est-à-dire à la coquille.
Cette
explication ne me satisfait pas vraiment… car les lettres mal
placées (distribution ou compo, peu importe) n’étaient pas
renvoyées illico chez le fondeur… Il est en revanche certain que
« coquille » a d’abord désigné une erreur de
distribution (dans la casse), engendrant nécessairement une erreur
de composition, d’où l’extension de sens.
La
coquille et la référence à Compostelle sont présentes dès
l’origine chez les typographes… « composer » aussi
(1531)… le goût pour les calembours merdiques également… donc, une
« coquille » mêlant tout ça n’est en rien
invraisemblable… (Le mystère ne me gêne pas. Au contraire. Et
puis… aujourd’hui, y a-t-il encore des coquilles ? Au sens
strict, non. Reste un terme bien pratique, bien poli, bien
alibesque pour désigner des erreurs et des fautes…)
Corps
Cicéro, Mesure
typographique.
Jadis,
les graveurs de poinçons modifiaient subtilement le dessin d’un
même caractère selon ses déclinaisons en différents corps. Ainsi
les traits filiformes étaient-ils légèrement épaissis dans les
petits corps, amincis dans les gros corps. Ces variations ont
aujourd’hui le plus souvent disparu : c’est, pour l’heure, un
des rares appauvrissements typographiques engendrés par la
photocomposition et l’informatique.
Force
de corps : nombre de points typographiques d’un
caractère.
Henri Didot, en 1826, et Laurent Deberny, en 1844, gravèrent des
caractères de deux points et demi, témoignages — illisibles
sans loupe — d’une magnifique virtuosité technique.
Appellation
traditionnelle
|
Points
Didot
|
diamant | 3 |
perle ou sédanoise | 4 |
parisienne | 5 |
nonpareille | 6 |
mignonne | 7 |
gaillarde | 8 |
petit-romain | 9 |
philosophie | 10 |
cicéro * | 11 |
saint-augustin | 12, 13 |
gros-texte | 14 |
gros-romain | 15, 16 |
petit-parangon | 18, 20 |
gros-parangon | 21, 22 |
palestine | 24 |
petit-canon | 28, 32 |
trismégiste | 36 |
gros-canon | 40, 44 |
double-canon | 48, 56 |
triple-canon | 72 |
grosse-nonpareille | 96 |
Berthelot
1992
donne des équivalences discutables, car, sans que le fait soit
mentionné, elles renvoient au point Fournier.